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14 mars 2018

Après les annonces gouvernementales : la colère monte chez les enseignants, « une vraie colère »

Interview de Aurélien Turlan, professeur d’histoire-géographie au collège Pierre Norange de St Nazaire.
Aurélien Turlan est professeur d’histoire-géographie au collège Pierre Norange de St Nazaire. Il coordonne l’activité des sections syndicales FO des lycées et collèges de la zone de l’Union Locale.

A suivre, l'interview parue dans l'INFONZ n°33

Infonz : le gouvernement a annoncé de profondes modifications des conditions d’obtention du baccalauréat et de l’accès à l’enseignement supérieure en facultés.

Aurélien : oui et les deux sont liées. Si auparavant le bac était la porte d’entrée à la fac, ce ne sera plus le cas. D’une part ce diplôme serait profondément dévalué et nous irions d’autre part vers une sélection à l’entrée dans l’enseignement supérieur. Ces annonces inquiétantes pour les lycées et étudiants, ont été suivies d’appels intersyndicaux à mobilisation – sans doute un peu précoces - les 1 er et 6 février : en réalité nous n’en sommes qu’au tout début.


Infonz : en quoi consistera cette sélection d’entrée à l’université ?

Aurélien : pour y accéder, le lycéen devra faire une liste de 10 vœux d’études supérieures, sans d’ailleurs pouvoir les modifier par la suite. Pour chacun il devra écrire une lettre de motivations.
Les universités décideront .... en fonction des places disponibles.
Le risque d’inégalités des chances est évident : les universités pourront faire leur marché de façon opaque. Les critères affichés sont en effet totalement flous et sources de subjectivité : « motivation », « ouverture sur le monde », «engagement associatif » .... Il faut ajouter que certains parents avertis pourront aider leurs enfants dans le choix des vœux et pour la rédaction des lettres de motivation, alors que bien d’autres ne le pourront pas.


Infonz : les enseignants des lycées auront-ils un rôle à jouer ?

Aurélien : oui, ils devront donner un avis sur chaque vœu de chacun de leurs élèves, ce qui n’est pas leur rôle.
Et puis, imagine le conseil de classe de fin d’année : avec en moyenne 35 élèves et en plus de compléter les bulletins, il faudra donner des avis sur chacun des 10 vœux de chaque élève soit 350 avis ! Si on dit 1 minute par vœu ça fait 350 minutes soit près de 6 heures !
Impossible de faire les choses correctement, ce serait de l’abattage et on ne pourra pas passer le temps nécessaire pour examiner sereinement les vœux.


Infonz : que sait-on du futur baccalauréat ?

Aurélien : il s’inscrira dans une « réforme » complète de l’enseignement au lycée, avec la disparition des filières.
Jusqu’en terminale, il y aurait un tronc commun : histoire géo – anglais - deuxième langue – philo – éducation physique et sportive et « démarche scientifique ». Ce tronc commun comprendrait moins d’heures d’enseignement qu’aujourd’hui : 12 heures en terminale pour l’ensemble des matières. Note qu’actuellement nous disposons de 3 heures pour seulement l’histoire géo ....
Par semestre, le lycéen choisirait de plus :
- 2 matières dites « majeures » couplées : par exemple maths et physique chimie ou économie et histoire géo ...
- 1 autre matière dite « mineure » par exemple une langue vivante.
A cela s’ajouterait 2 heures par semaine « d’accompagnement à l’orientation » : le concept est pour l'instant très flou : est-ce uniquement de l'orientation ou bien y aura-t-il aussi du soutien pour les élèves ? Les conseillers d’orientation seraient concomitamment supprimés. Pour se former à cette « matière », les enseignants se formeraient eux-mêmes sur internet ... sur leur temps personnel.
Pour le SNFOLC, c’est parfaitement clair : ils veulent aller vers des bac « maison » à valeur différente selon les établissements.


Infonz : donc des changements profonds pour les profs ...

Aurélien : nous faisons en ce moment énormément de réunions d’explications et nous sommes très bien reçus. Les enseignants sont très demandeurs car, au-delà des annonces dans les médias, il n’y a aucune communication officielle. Qui plus est nous ressentons un vrai mépris de la part du ministère que ne s’embarrasse d’aucune concertation.
Les collègues sont extrêmement inquiets pour leur métier, compte tenu notamment de la variation sur l’année scolaire du nombre d’élèves de leur classe. Ils craignent fort par exemple que les matières « couplées » ne leur imposent la polyvalence dans les enseignements.
Nous ne doutons pas au SNFOLC que la motivation essentielle de ce bouleversement - enrobé d’un affichage de bonnes intentions - soit en réalité la suppression de postes de professeurs (peut-être jusqu'à 25000 ! ).
Au fur et à mesure de nos explications, on sent que la colère monte .... une vraie colère.
Cette grande campagne d’informations en cours du SNFOLC est absolument indispensable pour réussir une mobilisation forte, laquelle ne manquera pas, tant l’enjeu est important.


Infonz : il y a eu aussi les annonces gouvernementales concernant les fonctionnaires en général ...

Aurélien : oui, la possible suppression de 25 000 postes d’enseignants c’est une des « contributions » aux 120 000 suppressions de postes de fonctionnaires annoncées.
L’accélération proclamée des embauches de contractuels, passe sous silence les problèmes que cette politique engendre déjà dans l’enseignement secondaire.
A savoir, des difficultés bien réelles à recruter des profs. à 1300 € par mois ; dans certaines matières comme le français c’est impossible. Les personnes qualifiées trouvent aisément, ailleurs, des emplois mieux payés. A contrario certaines matières sont enseignées par des salariés n’ayant aucune des qualifications nécessaires ....
Au final cette obsession à vouloir remplacer les enseignants formés à statut, par des salariés contractuels conduit à ne pas pourvoir des postes et ce sont les élèves qui sont lésés !
Par ailleurs, je doute fort que l’encouragement aux départs volontaires marche : même si ça se dégrade, les profs restent attachés à leur métier.
Quoiqu’il en soit nous relayons l’appel à la grève et manifestations du 22 Mars lancés par les fédérations de fonctionnaires FO, CGT, FSU, CFTC, Solidaires, CGC et FAFP.


Infonz : comment se porte le SNFOLC ?

Aurélien : très bien. Nous sommes présents - à des degrés divers - dans tous les lycées et presque tous les collèges, ce qui n’était pas le cas il y a 4/5 ans.
Nos tournées et nos réunions d’informations sont appréciés des collègues à tel point que nous sommes de plus en plus sollicités pour venir faire des AG, comme récemment à La Baule.
Nous nous attachons aussi à répondre aux affaires qui nous sont confiées : comme les conflits, de plus en plus fréquents avec des chefs d’établissement ; les répartitions d’horaires ; les demandes de mutation qui se heurtent aux « profils » imposés dans certains établissement ...
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Pour contacter Aurélien :
- Tél : 06 63 82 12 34
- Mail : aurelturlan@gmail.com