InFOrmation syndicale

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30 mars 2015

23ème Congrès Confédéral : extraits d'interventions et de résolutions

Le XXIIIe Congrès Confédéral de Force Ouvrière a eu lieu à Tours du 2 au 6 février 2015. 
Les délégués des syndicats de Loire-Atlantique (presque au complet) réunis pour la photo-souvenir au congrès confédéral.


Voir aussi : 
FO2015 Tours - Intervention de Patrick Hébert (vidéo)
- Photos FO44 (Picasa - Christophe Sey)


Extraits du discours introductif de Jean-Claude Mailly

"Le conflit des routiers est également une illustration d’un problème de dialogue social et de respect des parties à la négociation collective. En effet, comment comprendre un patronat qui refuse de se mettre autour de la table, même à la demande du gouvernement et ce alors que les salaires minima dans la branche n’ont pas été augmentés depuis deux ans et que certains taux horaires sont en deçà du Smic.
Ce conflit montre plusieurs choses : à quel point la question du pouvoir d’achat est centrale dans un secteur, qui plus est, est soumis à une concurrence forte avec le risque des dérives de la directive détachement et la nécessité de la conditionnalité des aides publiques, ce qui est une de nos revendications constantes.
Vous le savez, les contacts se sont renoués la semaine dernière et une réunion a lieu demain.
La question du pouvoir d’achat est une des questions centrales et une priorité dans nos revendications. Je le dis et je le répète, il est inadmissible qu´il n’y ait pas eu de coup de pouce au Smic et ce depuis 2012. Tout comme est inadmissible le gel du point d’indice.
En France, l’austérité budgétaire a contribué à faire baisser le pouvoir d’achat. On estime en effet qu’entre 2008 et 2015, une perte de 400 euros de pouvoir d’achat chaque année en moyenne, soit un retour en arrière au niveau de 2002, soit 13 ans de recul.
Comment, avec ce constat, ne pas parler d’austérité ? Le refus de reconnaitre la réalité de l’austérité et ses conséquences de la part du gouvernement s’apparente à une forme de déni.
Ah certes, la baisse du prix du pétrole observée depuis le dernier semestre aura indéniablement un impact positif sur le pouvoir d’achat des ménages mais cela ne suffira pas à remonter la perte de pouvoir d’achat subi.

Les négociations salariales dans les entreprises se présentent au plus mal et risquent d’être tendues. Moins de grain à moudre et en même temps, certains en profitent pour relancer la bonne vieille idée de supprimer la NAO pour la rendre triennale ! Et je ne parle pas de la fin des clauses de désignation pour la prévoyance.
Le discours « il faut faire des efforts » est insupportable,  quand les actionnaires, eux, ne sont pas au régime sec puisque les dividendes ont augmenté de 30 % au second trimestre 2014.
Mettre fin à l’austérité, en plus d’être indispensable, c’est aussi refuser la baisse du pouvoir d’achat et exiger, ce que nous faisons, une augmentation du Smic et du point d’indice et, dans la foulée, une renégociation de tous minima conventionnels de branches.

Refuser le coup de pouce au Smic sous prétexte que la politique menée est celle de l’allègement du coût du travail et que, compte tenu des exonérations de cotisations patronales, toute augmentation du Smic coûte cher à l’Etat, est inadmissible et traduit un véritable mépris pour les salariés."



Extraits de la résolution générale...

" Déterminé à obtenir de véritables réformes améliorant effectivement les droits et garanties des salariés, le congrès appelle à combattre les contre-réformes destructrices de droits sociaux et attentatoires à la solidarité ouvrière, y compris par la grève si nécessaire.
Soulignant que l’action syndicale vise à établir les revendications et à se donner les moyens indispensables pour les faire aboutir, le congrès appelle l’ensemble des militant(e)s FO à développer la syndicalisation, à implanter l’organisation syndicale et à mettre en œuvre l’ensemble des décisions du congrès.
(...) L’arrêt de l’austérité, le retrait du pacte de responsabilité, du projet de loi «Macron» et de la réforme territoriale, la défense des services publics, du statut de la fonction publique, parties constituantes de la République, de la protection sociale, des conventions collectives et l’augmentation générale des salaires nécessitent une réaction interprofessionnelle.
Construire le rapport de force à même de faire reculer le gouvernement et le patronat et faire aboutir les revendications de FO est indispensable.
Dans ce cadre, le congrès se félicite du rassemblement national du 16 décembre 2014 à Paris ayant permis de réaffirmer les positions et revendications de FO.
Tout en soulignant que l’action commune bien définie, sur des revendications claires, est un gage d’efficacité, le congrès arrête le principe d’une journée nationale de grève interprofessionnelle et de manifestations, dont une à Paris, contre l’austérité et pour l’aboutissement des revendications. "

... et extraits de la résolution sociale

" Le congrès rappelle avec force la nature républicaine de la protection sociale du régime d’Assurance Maladie obligatoire, expression de la solidarité entre tous les salariés et garante de l’égalité d’accès aux soins pour tous. Il est plus que jamais nécessaire de se mobiliser pour préserver ce régime des attaques dont il est régulièrement l’objet.
(...) Le congrès condamne tous les dispositifs de maîtrises budgétaires comme les mesures de rigueur décidées au nom de la réduction des dépenses publiques.
Le congrès réaffirme  l’opposition de FO aux lois et politiques inscrivant l’assurance maladie dans un budget contraint.
Il réaffirme son opposition aux principes de l’ONDAM de l’enveloppe fermée et limitative. Il condamne le pacte de responsabilité et la politique d’économie de 10 Mds d’€ sur les années 2015, 2016 et 2017 conduisant à un taux de progression de l’ONDAM limité à  2,1% en 2015, 2% en 2016, et 1,9% en 2017. Cette politique risque d’entraîner dès 2015 une exigence d’économies nouvelles impactant les niveaux de remboursement ; ce sont alors les assurés sociaux qui seront directement touchés.

(...) Le congrès se prononce pour la suppression de la participation forfaitaire sur les actes lourds, contre toutes les franchises médicales, pour la suppression du forfait hospitalier, contre tout déremboursement.
Il s’oppose aussi à tout transfert de charges de l’assurance maladie vers les organismes complémentaires car il se traduit par une remise en cause de la solidarité entre tous les salariés et une hausse des coûts pour les assurés sociaux. Il s’oppose à toute communication aux assurances privées, complémentaires ou aux mutuelles, des données individuelles de santé détenues par l’Assurance maladie. (...) "




Extraits de l'intervention de Patrick Hébert

"Depuis notre dernier congrès à Montpellier, le moins que l’on puisse dire c’est que la situation s’est aggravée, elle s’est aggravée au plan international, même si depuis Jaurès nous savons que le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée dormante porte l’orage, on est quand même à chaque fois surpris et inquiet quand on voit les conflits se multiplier à l’échelle internationale.
Nous savons aussi que, comme disait Clausewitz, la guerre n’est que la prolongation de la politique par d’autres moyens. Nous sommes effectivement confrontés à une guerre mais aussi une guerre de classes. Jean Claude parlait de lutte de classes, parce qu’il est modéré nous le savons bien. Warren Buffet dit c’est une guerre de classes et il ajoute c’est sa classe qui est en train de la gagner. C’est toujours de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué.

Nous sommes confrontés à cette situation et nous savons que si nous ne réagissons pas ils nous voleront tout. Ils nous ont prévenus, ils ne s’en cachent même pas. Souvenons nous de ce que Kessler avait dit : systématiquement, méthodiquement, il faut détricoter tout ce qui a été construit notamment à partir du Conseil National de la Résistance. Leur objectif, foutre en l’air tout ce qui est protection sociale collective, que ce soit les conventions collectives, les statuts, nous faire revenir au moyenâgeux contrat individuel de louage de services. Où on se retrouverait seul face au patron, voilà l’objectif qu’ils se sont fixés.

Dans ce contexte, même si c’est difficile, même si elle a pris des coups, la classe ouvrière résiste. Elle n’est pas morte, elle est debout. Ca s’exprime de manière parfois curieuse. Regardez ce qui s’est passé en Grèce récemment : cela a pris une forme électorale. Nous verrons bien ce que fera le gouvernement qui a été élu. Vous savez, comme disait Bergeron, les partis politiques sont très biens quand ils sont dans l’opposition.
D’ailleurs, pour ma part, je trouve que la situation idéale serait que tous les partis soient dans l’opposition. Vous avez vu en Espagne aussi : d’accord cela prend des formes électorales, mais il faut comprendre ce que cela signifie comme recherche de résistance. C’est ça l’important.
Peu importe ce que fera le gouvernement, pour ma part, je n’ai pas d’illusions en la matière. Mais le vote en Grèce, la manifestation à Madrid samedi, exprime une recherche d’un mouvement de résistance, à l’échelle européenne et à l’échelle internationale qui, pour l’instant, ne prend pas ces formes en France, mais qui se cherche.

En France il ne se passe pas rien. Il y a des grèves parfois dans les petites boites, parfois victorieuses, il y a eu les manifestations contre la loi Macron le 26 janvier, il y a eu la manifestation des camarades d’EDF et des cheminots le 29, il y a eu le mouvement des routiers, oui camarades, la lutte des classes existe en France et nous avons une responsabilité extrêmement importante.
C’est un congrès. Il faut parler de l’avenir, mais il n’est pas inutile de faire le bilan de notre activité.
Puisque Jean Claude a présenté un rapport moral et qu’il demande un vote au nom du bureau confédéral, la confédération a-t-elle respecté ou bouffé le mandat ? C’est comme ça qu’on dit entre nous.
Pour ce qui me concerne, je considère que ceux qui avaient le mandat entre deux congrès, c’est-à-dire à la fois le CCN, la Commission Executive et le bureau confédéral ont respecté le mandat. Contre le syndicalisme rassemblé qui conduit à l’échec comme on l’a vu en 2010, anesthésiant, nous n’avons pas hésité, bien-sûr il y a eu débat entre nous, mais en bout de course, nous n’avons pas hésité à quitter l’intersyndicale paralysante. Nous avons repris notre indépendance, et depuis on ne s’en porte que mieux. Contre les tentatives d’intégration corporatistes, notamment au travers de la conférence sociale, c’est encore notre confédération qui a pris l’initiative de quitter la conférence sociale entraînant avec nous la CGT et quelques autres.
Et plus récemment, la tentative pitoyable du gouvernement prenant un prétexte dramatique de nous entraîner dans l’union sacrée : nous n’avons pas marché. Le bureau confédéral n’a pas participé à cette intersyndicale incroyable où on voyait coude à coude, Lepaon, Berger et Gattaz du MEDEF. Ensemble dans cortège prétendument syndical. Nous n’avons pas accepté ça.

 Pour toutes ces raisons, et bien d’autres, même si je ne suis pas d’accord avec tout, pour l’essentiel je considère que notre confédération est sur la bonne voie et c’est pour cela que je voterai le rapport moral.
Il y a des moments où il faut savoir ce qu’est l’essentiel.
Je rappellerai notamment aux plus jeunes camarades, qu’en 1969, alors que nous étions confrontés à un projet liberticide du général de Gaulle, le référendum de 69,  ce qu’on appelait à l’époque le courant lutte des classes dans la CGT_FO qui regroupait les anarchistes, les trotskistes et ceux qu’on appelait curieusement les socialistes de gauche, n’ont pas hésité à voter le rapport moral de Bergeron lorsque la confédération disait non au corporatisme, c’était l’essentiel. Est-ce que vous croyez qu’à l’époque il n’y avait pas de désaccord sur tel ou tel point ? Comme il peut y en avoir aujourd’hui.
Il y a des moments où il faut s’avoir s’orienter sur ce qui est essentiel et non sur ce qui est secondaire. Et nous sommes dans cette situation.

Parce que nous avons ce bilan, nous occupons une place que nous pouvons qualifier de centrale, et donc pour ma part je considère que c’est la première place. Je ne fais même pas allusion aux résultats électoraux qui sont excellents et vous le savez. Oui je pense que nous occupons une place essentielle et que la question qui nous est posée aujourd’hui c’est comment aider la classe ouvrière à réagir. C’est la question de l’action.
Nous n’avons pas d’autre outil que le rapport de force, et le rapport de force passe par la grève.
Nous le savons depuis ce vieux débat au congrès de Nantes en 1894. Il y avait les guesdistes qui considéraient qu’il fallait élire de bons députés qui nous voteraient des bonnes lois. Il y avait d’autres courants qui considéraient que la classe ouvrière devait défendre par ses propres moyens ses revendications.
Fort heureusement c’est le deuxième courant qui l’a emporté et nous en sommes les héritiers.
Aujourd’hui comme nous l’avons fait en 1995, il nous revient de prendre une initiative. Pour ma part je n’ai pas d’inquiétudes. Je vois bien ce qui se passe dans la CGT. Ne croyez pas que ce soit simplement un combat des chefs. Dans la CGT, la discussion traverse cette organisation entre ceux qui, comme Lepaon, veulent rester avec la CFDT dans le cadre du syndicalisme rassemblé, et d’autres militants qui entendent mener la bagarre.

Alors, si nous prenons une initiative, je ne doute pas que nous aurons la force d’entraîner avec nous d’autres organisations.
Parce que la question qui est posée, ce n’est pas simplement une journée de grève avec manifestation à Paris qui me semblent pourtant nécessaires. Nous savons que compte tenu des forces qui sont en face de nous, ce n’est pas par une simple journée d’action que nous gagnerons. La question qui est posée, comme le dit Jean Claude, c’est bloquer le pays.
Bloquer le pays, ça s’appelle la grève générale. La grève générale, ça ne se décrète pas nous le savons.
Par conséquent il nous revient à nous tous ici, nous sommes 3000, au lendemain de ce congrès, avec nos camarades de travail, de leur expliquer la situation, les mobiliser, préparer l’action.

Marx disait : quand les idées s’emparent des hommes, elles deviennent des forces matérielles.
Victor Hugo, un peu plus poétique bien sur disait : il vient une heure où protester ne suffit plus, après la philosophie il faut l’action, la force vive achève ce que l’idée a ébauché.

Soyons la force vive, achevons ce que l’idée a ébauché !
Vive la classe ouvrière !
Vive la CGT Force Ouvrière ! "