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26 janvier 2017

Chantiers Navals STX : la section FO mobilisée

Interview parue dans INFONZ n°23 (décembre 2016)
A l’occasion des réunions d’« heures d’informations syndicales » animées en ce moment par la section FO des chantiers navals STX, nous avons rencontré Nathalie Durand-Prinborgne et Jean Marc Perez.


Comment sont organisées ces HIS ? 

Nathalie : nous faisons cinq réunions FO au total, de 2 heures chacune. Une dans la zone de Brais, une pour les techniciens et cadres au bureau d’études et trois dans la salle Normandie pour les ouvriers, organisées en fonction des horaires de travail (quart du matin …). Après avoir présenté les sujets et nos revendications, nous souhaitons qu’un véritable débat s’installe.
On peut déjà dire que notre présentation est bien appréciée et que les collègues sont extrêmement attentifs …


Justement, quels sont les sujets à l’ordre du jour à STX ?

Jean Marc : il y en a quatre: la vente du chantier évidemment, la négociation salariale et celle sur la « qualité de vie au travail » et les activités sociales du CE.


Dans le précédent numéro d’Infonz nous avons présenté l’avis de la section FO sur les repreneurs retenus. Où en sommes-nous ? 

Jean Marc : en ce qui concerne Fincantieri – scénario catastrophe pour FO -  les dirigeants ne prennent aucun engagement de sauvegarde des emplois. Or il y a un sérieux risque pour plusieurs centaines d’emploi « doublons »  au service commercial, aux achats, dans les bureaux d’études, etc.… De même pour la conservation des commandes sur le site de St Nazaire : les sites italiens seraient privilégiés.

Nathalie : ils prétendent vouloir « contrôler » la concurrence chinoise. On a vu ce que cette stratégie a donné pour les porte-containers et les méthaniers : on ne contrôle plus rien !

Le groupe Genting, basé à Hong Kong, également candidat à la reprise de St Nazaire, est spécialisé dans le tourisme et la croisière, avec les compagnies Star Cruises, Dream Cruises, Crystal Cruises. En 2016, il a racheté 4 chantiers allemands. Il y a là vraiment un risque de transfert de technologie et de savoir faire.

Qui plus est, aujourd’hui on construit 6 à 7 paquebots dans le monde et par an, ce qui permet une régulation du marché. Avec les chinois on pourrait passer à une trentaine : un « boom «  dangereux pour des armateurs comme MSC.
Celui-ci envisagerait dans cette situation une action devant la cour européenne pour inégalité de concurrence.

Jean Marc : à l’instar des américains, les chinois se protègent ; les bateaux qui naviguent dans leurs eaux territoriales doivent être construits en Chine.
Révélateur, le groupe Genting n’a pas voulu rencontré les syndicats … En bref tout cela n’est guère rassurant.


Vous avez aussi rencontré les responsables politiques …

Nathalie : oui, nous les avons alertés. Mais, la stratégie actuelle de l’Etat est de laisser faire les chinois et de « les contrôler » … Ils tirent argument de ce que, lors du rachat par le coréen STX, il n’y a pas eu de transferts de technologie. 

Mais la situation est tout à fait différente : à l’époque le carnet de commande était vide, avec un plan de redressement à St Nazaire et de plus STX n’avait aucun financement disponible pour réaliser ces transferts. Aujourd’hui, Genting a prouvé qu’ils avaient les reins beaucoup plus solides pour ce rachat et le carnet de commande est plein : il y a 14 navires à livrer jusqu’en 2016.


Quel est le calendrier et les perspectives des responsables de l’Etat ?

Jean Marc : les dossiers de reprise sont à déposer pour le 26 décembre. Ensuite le tribunal central de Séoul décidera … Cela pourrait prendre plusieurs mois. Mais il faut souligner qu’il y a urgence pour le groupe coréen STX qui a besoin de cette vente pour finaliser son plan de redressement. 

L’Etat français, actionnaire à 33,4 %, annonce qu’il mettrait des conditions. Cela ne rassure pas pour autant : on a vu avec la reprise d’Alstom par Général Electric, que « l’engagement » de ne pas supprimer d’emplois n’a pas été respecté.

Nathalie : la « loi Montebourg » permet à l’Etat de refuser la reprise d’une activité réputée « stratégique ». Mais l’Etat doit alors faire une contre-proposition : or aujourd’hui il n’en a aucune !  

Un autre « idée » : la DCSN serait partenaire du montage avec Fincantieri. Or l’Etat y est actionnaire majoritaire à 70 %. Par ce biais - avec les 33,4 % des chantiers - il pourrait devenir majoritaire … Problème : rien n’est précis, étant donné qu’il n’y a aucune information sur la répartition du capital. Cela ressemble fort à une partie de poker menteur.


Quelle est, dans cette situation, la revendication de FO ?

Nathalie : nous sommes simplement pragmatiques. Une minorité de blocage comme actuellement peut permettre de s’opposer à une reprise. Mais cela ne résous pas le problème. 

La seule solution pour assurer la pérennité du chantier naval et des emplois est de le mettre sous la protection de l’Etat (de façon temporaire ou définitive) : soit par une prise de contrôle majoritaire, soit par une nationalisation. Pour les finances publiques, passer de 33,3 % à 51 % ne représenterait que quelques millions d’€. Le rachat complet par l’Etat représenterait une somme étonnement faible comparée aux 50 milliard d’€ de cadeaux sociaux et fiscaux au patronat.

Jean Marc : qui plus est, cela a été fait dans le passé pour les industries aéronautiques et spatiales qui sont aujourd’hui des leaders mondiaux incontestés et où les salaires et les garanties sociales sont également meilleurs que les nôtres. 

Pour mémoire aussi, l’Etat italien possède au moins 70 % des chantiers navals Fincantieri, qui sont ainsi nationalisés depuis longtemps. Bruxelles a essayé d’imposer sa privatisation via une ouverture du capital et la mise en bourse. Mais la forte mobilisation des salariés  italiens l’a empêché …. 


La section FO a lancé une pétition pour la nationalisation et l’unité syndicale …

Nathalie : en 2010 et 2012 : nous avions comme revendication intersyndicale  l’ « entrée majoritaire de l’Etat dans le capital », laquelle a permis une intense mobilisation qui a été  déterminante pour obtenir l’implication de l’Etat : toutes les commandes et les grands investissements, ont été obtenus grâce à l’aide de l’Etat qui a, de fait, joué le rôle de l’actionnaire majoritaire ! 

Aujourd’hui il faut à nouveau l’unité sur cette revendication, unité souhaitée et demandée par les salariés. C’est pour y arriver que nous avons décidé cette pétition, sur cette double nécessité.

Jean Marc : d’ailleurs la satisfaction des revendications est liée à la question de la nationalisation. 
On le voit bien en ce moment avec la négociation salariale en cours : la Direction refuse de s’engager sur un accord pluriannuel comme nous le demandons, du fait du contexte de la vente. 

Contrairement à la position actuelle de la section CGT de STX, nous pensons que la question de l’actionnariat futur des chantiers est décisive pour nos revendications.

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Lire aussi :
-STX : quid du patriotisme économique ? Communiqué de presse de la fédération FO des Métaux du 4 janvier 2017
-Rachat par Fincantieri : Qui prendra le risque d’ouvrir la porte à la Mafia italienne ? STX Saint-Nazaire - Communiqué de la section FO, le 6 Janvier 2017