InFOrmation syndicale

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25 mai 2016

FO Quo Vadis : Nous sommes prêts à reconduire la grève jusqu’au retrait du projet de loi Travail

Interview parue dans L'Ouest-Syndicaliste n°666
Entretien avec Laurence Lebatard, déléguée syndicale Force Ouvrière chez Quo Vadis.


Peux-tu nous présenter ta section syndicale ?
Quo Vadis est une entreprise de 208 salariés, spécialisée dans la fabrication des agendas. La section syndicale a été créée en 1978. Son secrétaire depuis 2 ans est Thomas Flahaut. Lors des dernières élections professionnelles de 2014, nous avons obtenu 70 % des suffrages, ce qui représente 15 élus (DP, CE et CHSCT).

Quelles sont les raisons d’un tel résultat ?
C'est tout d'abord le fruit du travail formidable que font tous les camarades de la section sur le terrain. Nous avons  le souci permanent de rendre compte des négociations avec la direction et d'informer les collègues en toute circonstance, notamment dans la dernière période concernant le projet de loi El Khomri.
Un tel résultat s'explique également par les négociations menées par Force ouvrière les années précédentes, notamment en 2011, lorsque les patrons de notre branche ont dénoncé la convention collective « Articles de papeterie » dont nous dépendions.

Peux-tu nous en dire plus ?
La direction a cherché, en nous rattachant à la convention collective ID 3135 du cartonnage, à abaisser le coût du travail. Les pertes pour les salariés étaient énormes. Dans ce contexte, les sections FO et CGT étaient en discussion avec la direction. A chaque nouveau tour de négociation, FO rendait compte aux salariés. Mais ça n'avançait pas et la date butoir approchait dangereusement. C'est alors que plusieurs salariés ont fait le tour des ateliers et des bureaux. A plusieurs, nous nous sommes dits : « Stop, on perd trop. On sort ! ». La grève était décidée. Rapidement, tout le monde était sur le parking : équipe du matin, équipe d'après-midi et bureaux. Un comité de grève a été élu, intégrant les sections syndicales FO et CGT. J'ai d'ailleurs été élue dans le comité de grève.

Comment les négociations se sont-elles poursuivies ?
Le comité de grève a rejoint la table des négociations. Le PDG ne voulait pas s'engager, mais il souhaitait qu'on le croie sur parole et que tout le monde retourne à son poste de travail. Pour les grévistes, c'était hors de question. La grève a duré 5 jours et le PDG a cédé. Nous avons préservé nombre d'acquis prévus dans l'ancienne convention collective : le maintien du mode de calcul de la prime d’ancienneté (maxi 15% pour 15 ans), la majoration des heures de nuit(25%), le maintien des indemnités de départ en retraite, le maintien du calcul des jours d’ancienneté, le maintien de la subvention CE (1% de la masse salariale).

Est-il juste de dire qu'en 2011, les salariés de Quo Vadis, avec leurs organisations syndicales, ont fait l'expérience de ce que souhaitent faire le gouvernement et le patronat, à travers le projet de loi El Khomri et l'inversion de la hiérarchie des normes, qui signifierait la mise à mort des conventions collectives ? 
Oui, tout à fait. Il y a une mémoire collective à Quo Vadis, qui explique sans doute le degré d'engagement des collègues pour le retrait du projet de loi. Car on voit bien également, à travers cette grève de 5 jours, que c'est en nous appuyant sur une convention collective que nous avons pu sauvegarder nos acquis.

Comment se sont déroulées les dernières négociations annuelles obligatoires (NAO) ?
Fin 2015, la section FO a signé un procès-verbal (PV) de désaccord. Alors que la section revendiquait +2,5 % d'augmentation générale (AG), la direction s'est arc-boutée sur +0,8 % d'AG. La direction a par ailleurs voulu imposer une modulation du temps de travail « +2 heures / - 2 heures »  qui aurait soumis les salariés de l'entreprise aux « aléas de la production ». Prenons l'exemple d'une machine dans l'atelier en panne. Baisse des capacités de production. La direction aurait pu appeler un collègue le jour-même en disant : « Aujourd'hui, tu viens à 16h00 au lieu de 14h00 » et les heures auraient été ponctionnées sur ses RTT  « direction » (RTT imposées par la direction). La direction proposait en contrepartie une AG de +0,5 %.

C’est inacceptable !
Pour la section CGT-FO, c'était non, clairement. Ce point n'était pas négociable. Alors, nous avons réuni une assemblée générale pour informer les collègues. 95 % des salariés étaient présents. A l'unanimité, l'assemblée a voté contre le projet de modulation et c'était réglé.
Mais la question des augmentations de salaires n'avançait pas. La direction n'a jamais cédé au-delà de +0,8 %. Elle était prête à proposer +1 %, avec notre signature. Nous avons refusé et nous avons organisé une nouvelle assemblée générale, à nouveau très suivie. On explique la situation : ou on signe à 1 % ou on signe un PV de désaccord et c'est la décision unilatérale à +0,8 % de l'employeur qui s'applique. A nouveau, l'AG décide à l'écrasante majorité de rejeter la dernière proposition de la direction.

Bagarre sur la convention collective, remise en cause de vos acquis collectifs, tentative de modulation du temps de travail, NAO... C'est un concentré de tout le contenu du projet de loi EL Khomri. Comment la section CGT-FO de Quo Vadis mène-t-elle la bataille pour son retrait ?
Dès fin février, début mars 2016, au moment où l'avant-projet de loi commençait à être connu, nous avons fait la « tournée terrain ». Tous les collègues ont été vus un par un, dans les ateliers et les bureaux, pour expliquer le contenu du texte et donc les raisons pour lesquelles celui-ci doit être retiré. Quelques salariés de Quo Vadis étaient déjà présents dans la manifestation du 9 mars. Ensuite, nous avons continué à informer les salariés sur les pseudo-améliorations de la CFDT. Nous n'avons eu de cesse de poursuivre les discussions et d'afficher nos analyses.

Les salariés de Quo Vadis étaient très bien représentés dans le cortège du 28 avril...
Dans le cadre de la préparation de la grève interprofessionnelle du 28 avril, nous avons organisé une AG pour les trois équipes : matin, après-midi et régulière (c'est-à-dire les bureaux). Nous sommes déterminés et prêts à repartir, à reconduire la grève, à bloquer la production jusqu'au retrait du projet de loi «Travail», dès que la situation le permettra.

Dans un communiqué commun, les confédérations n’excluent pas une manifestation nationale à Paris. Que penses-tu d’une telle possibilité ?
J’y serais plutôt favorable. Monter à Paris, nous y serions prêts. Nombre de camarades de Quo Vadis monteraient.

Le premier ministre Manuel Valls vient d'annoncer le 49-3. Comment réagis-tu ?
Je suis révoltée. On ne peut pas accepter l’inacceptable. C'est impossible !