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11 octobre 2016

Chantiers Navals STX de Saint-Nazaire : FO demande à l’état d’intervenir

Alors que le carnet de commandes est plein pour 10 ans, le Coréen STX, propriétaire à hauteur de 66,67% des chantiers navals de Saint-Nazaire, a annoncé leur vente d’ici la fin 2016. FO a adressé une lettre au 1er ministre Manuel Valls où elle demande la nationalisation, ou tout au moins, la participation majoritaire de l’état.
A suivre  : l'entretien avec Nathalie Durand-Prinborgne, déléguée syndicale CGT-FO STX


[Interview parue dans L'Ouest Syndicaliste n°670]


Les chantiers navals STX de Saint-Nazaire emploient 2 600 salariés et font travailler 4 000 sous-traitants. Les carnets de commandes sont pleins, mais les chantiers sont en vente. Peux-tu nous expliquer la situation ?
Une décision de justice est attendue en Corée concernant STX Offshore & Shipbuilding, la maison mère de STX France. La société va avoir un besoin urgent de liquidités, parce qu'elle va être placée en redressement ou en liquidation judiciaire. D'où sa volonté de vendre les chantiers d'ici la fin de l'année, alors que les carnets de commandes sont en effet pleins pour dix ans !

Peux-tu revenir sur ces ventes successives ?
Entre 1976 et 2006, les chantiers de Saint-Nazaire étaient la propriété exclusive d'Alsthom Atlantique, devenu Alstom à compter de 1998. En 2006, les chantiers sont littéralement bradés au norvégien Aker Yards pour la somme dérisoire de 50 millions d'euros.

50 millions d'euros, c'est une misère...
Oui, d'autant qu'Alstom a au même moment réinjecté 350 millions d'euros d'investissements sur le site, en même temps qu'il le vendait : sept fois le prix de vente ! De son côté, Aker Yards a sans doute profité d'un sacré bénéfice sur le dos des salariés des chantiers et sous-traitants, lorsqu'il a revendu dès 2008 le chantier au coréen STX.

Pourquoi dis-tu "sans doute" ?
Parce qu'à l'époque, Nicolas Sarkozy, qui s'était posé à plusieurs reprises en "sauveur" d'Alstom, n'a pas fait preuve de transparence en la matière. Malgré ses engagements, il n'a jamais transmis aux organisations syndicales les conditions de cette deuxième vente.

Aujourd'hui, qui possède les chantiers navals de Saint-Nazaire ?
STX est actionnaire à hauteur de 66,66 % et l'Etat à hauteur de 33,34 %. C'est la minorité de blocage. Il faut se dire que STX n'était que le quatrième chantier naval de Corée... derrière Samsung, Hyundaï et Daewoo. Dès 2008, nous savions que STX s'était mis en grande difficulté financière en acquérant le site de Saint-Nazaire... Dans cette situation, c'est sous la pression de l'action revendicative que l'État a abondé le capital de l'entreprise.

Alstom a donc complètement disparu des chantiers...
En 2010, Alstom a vendu ses dernières parts à STX. Le prétendu sauvetage d'Alstom par Nicolas Sarkozy, dont on voit également les résultats avec l’annonce de la fermeture du site de Belfort, s'est traduit par sa totale disparition du capital d'une industrie phare de notre pays !

Le président François Hollande et son gouvernement nous refont le coup du "sauvetage" d'Alstom...
Hollande et Valls sont en campagne électorale. Ils nous mentent. L'état est actionnaire à 20 % de l'entreprise Alstom. A ce titre, il est représenté au sein de son conseil d'administration. Il n'est donc simplement pas concevable qu'ils aient été mis devant le fait accompli. En réalité, la seule chose qu'ils reprochent au PDG actuel d'Alstom, c'est le timing à quelques mois des élections présidentielles.

François Hollande n'était-il pas venu à Saint-Nazaire, lorsqu'il était en campagne électorale ?
A l'époque, les chantiers étaient au bord de la rupture. Les heures de chômage partiel s'accumulaient pour les salariés. François Hollande, qui était alors déjà en campagne présidentielle, avait déclaré qu'il ferait tout pour trouver une solution pour « sauver » les chantiers. Il avait mis en avant l'idée d'un consortium d'industriels français... pour éviter la fermeture. Aujourd'hui, le gouvernement ne communique rien. Une demande d'audience auprès du premier Ministre a été effectuée par l'Union départementale, le syndicat des métaux de Saint-Nazaire et la section STX. Le cabinet de Manuel Valls a pour le moment rejeté notre demande.

Quel est l'impact de l'annonce de la vente sur l'activité des chantiers navals ?
Les commandes actuelles ne sont pour l'instant pas remises en cause, mais l'inquiétude est évidemment de mise. Les négociations pour de nouveaux contrats sont aujourd'hui mises à mal. Notre principal client, MSC, a d'ores et déjà signifié qu'il ne souhaiterait plus travailler avec les chantiers de Saint-Nazaire, si ceux-ci étaient vendus à un repreneur chinois. La qualité de nos constructions est en jeu, alors que notre savoir-faire est aujourd'hui mondialement reconnu, tant pour les bateaux que pour les produits qui relèvent de la diversification de notre activité : énergies maritimes renouvelables, plate formes pétrolières, sous-stations électriques pour les champs éoliens...

Quelles pistes sont actuellement avancées concernant le repreneur ?
Plusieurs noms circulent, qui ne nous rassurent pas spécialement. On a parlé un temps d'un rapprochement avec DCNS, avec lesquels nous travaillons déjà en commun sur certains projets. Mais la piste semble s'éloigner. Est également évoquée la piste du néerlandais Damen, mais celui-ci est en concurrence avec DCNS sur les constructions militaires... Dès lors, l'activité de la DCNS serait elle-même remise en cause, ce qui n'est pas acceptable. Le nom de l'italien Fincantieri, détenu à 100 % par l'Etat italien circule, mais cette solution n'en est pas une, puisqu'ils ont décidé de faire du transfert technologique avec la Chine. Cela signifierait la mort du chantier à moyen terme.

Comment se positionne la section syndicale FO STX concernant le repreneur ?
Pour nous, cette question n'est pas du tout anodine, ni neutre. L'identité du futur acquéreur conditionne l'avenir du chantier, mais également les revendications que nous portons concernant les conditions de travail et de rémunération des salariés : le recrutement, l'augmentation des salaires, la fin du travail détaché, véritable dumping social légalisé par la réglementation européenne...

Quel rôle doit jouer l'Etat ?
Aujourd'hui, nous interpellons le premier ministre sur la nécessité de nationaliser le chantier ou d’une prise de participation majoritaire de l’état, même provisoirement. La désindustrialisation massive du pays, menée par les gouvernements de "gauche" comme de "droite", n'est pas une fatalité. C'est une question de volonté politique. Car le gouvernement doit prendre ses responsabilités, surtout quand l'emploi de plus de 6 000 salariés est en jeu. En 2012, alors que le chantier a frôlé la fermeture, c'est l'intervention de l’État qui a débloqué le financement par les banques de nouveaux projets. Mais ne nous trompons pas : l'action du gouvernement n'a été mise en oeuvre que sous la pression de l'action revendicative que nous menons depuis des années, dans l'unité avec les autres organisations syndicales quand cela est possible.

Tu fais notamment référence à la campagne de 2010...
Oui, mais pas seulement. En 2010, nous avons organisé une bataille pour la nationalisation des chantiers, dans l'unité CGT-Force ouvrière et CGT. Plus d'une centaine d'élus soutenaient alors notre revendication, dont Jean-Marc Ayrault. Celui-ci, alors maire de Nantes, avait même manifesté à Saint-Nazaire avec les salariés et leurs organisations syndicales, sous la banderole "nationalisation". Mais c'était bien sûr avant de devenir premier ministre, avant Florange, avant les ABRF... Mais si 2010 a été un point d'orgue, nous n’avons jamais relâché la pression, ni abandonné le terrain de la négociation. Et quand il le faut, nous appelons à la grève. Ce fut notamment le cas pour le retrait, puis l'abrogation de la loi Travail ces derniers mois...