InFOrmation syndicale

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09 février 2009

L'UNITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIALE N'EST PAS L'EMPLOYEUR !


C'est ce que décide fermement la Cour de cassation dans un arrêt de principe du 16 décembre 2008. Dans cette affaire, la Fédération des Employés et Cadres Cgt-Force Ouvrière conteste un accord relatif à « l'organisation sociale de l'unité économique et sociale Assurance France Générali » du 13 octobre 2004, selon lequel, « les entités formant l'UES AFG "constituent l'entreprise Assurance France Générali au sens du droit du travail, laquelle délimite le cadre naturel des relations collectives et individuelles de travail" ». L'accord stipule encore que « "l'entreprise Assurance France Générali, est l'employeur unique au sens du droit du travail" des salariés des structures composant cette UES, "en tant que c'est sur elle que pèse à leur profit l'ensemble des obligations légales et conventionnelles attachées à l'exécution de leur contrat de travail" ».

La Cour d'appel de Paris a fait droit à la demande de la FEC et de la Section Fédérale des assurances dans un arrêt du 31 mai 2007.

La contestation de la FEC n'est pas de pure forme ; les implications pour les salariés et leur contrat de travail, ne sont pas sans conséquences. Les questions de mobilité et leurs incidences sur la modification, ou non, du contrat de travail n'étant pas des moindres !
La « Semaine Sociale Lamy », du 3 septembre 2007, publiait sur cette question, une réflexion du Professeur Antoine Lyon-Caen intitulée « l'UES sauvée de ses excès ».

On retiendra notamment que, selon lui, vouloir faire de l'UES l'employeur unique est un projet dangereux. « Il ne peut y avoir substitution d'employeur qu'avec le consentement du salarié. (...) Eriger l'UES en employeur, ce serait donc transformer ce qui aujourd'hui est qualifié de transfert, demandant, pour advenir, l'assentiment du salarié, en une (ré)affectation du salarié, au sein d'une organisation maîtrisée par un employeur, l'UES. Le passage d'une société à l'autre, dans l'UES, deviendrait une simple modalité d'exécution du contrat ».

Rappelons que l'unité économique et sociale ne peut se constituer qu'entre des entreprises juridiquement distinctes, présentant des liens étroits, et considérées comme une seule entreprise pour l'application du droit du travail, et en particulier de la législation sur la représentation du personnel.

L'unité économique et sociale était destinée, à l'origine, à déterminer le cadre le plus favorable aux institutions représentatives du personnel. Pourtant, les entreprises n'ont eu de cesse que d'utiliser cette notion d'UES dans le but de remettre en cause les institutions représentatives du personnel, de faire cesser des mandats en cours pour favoriser la mise en oeuvre de réorganisations ou de restructurations, ou encore de définir des périmètres permettant de réduire l'influence de certaines organisations syndicales. Générali a manifestement souhaité aller plus loin.

Déjà, l'évolution de la jurisprudence (en particulier deux arrêts du 2 juin 2004 et 13 juillet 2004) a fait de l'unité économique et sociale une entité autonome dont la finalité n'est plus exclusivement de favoriser la représentation du personnel.
Depuis un bon moment donc, la volonté de faire de l'UES « l'entreprise en droit social » existe. Comme le souligne le Professeur Lyon-Caen, si l'UES est apte à constituer un cadre de négociation collective, cette volonté et cette transformation conduiraient à ce qu'elle devienne le cadre des rapports individuels de travail ; ce qu'il dénonce à raison.
A l'inverse, dans deux articles partisans, publiés également, par la « Semaine Sociale Lamy » les 16 février et 23 février 2004, Bernard BOUBLY, conseiller doyen de la chambre sociale de la Cour de cassation appelait de ses voeux cette évolution de l'unité économique et sociale.
Celui-ci dénonçait notamment « la frilosité qui contribuait à cantonner les intérêts de l'UES aux différentes institutions représentatives. ». Selon lui, « les personnes juridiques s'effacent lorsque l'UES est reconnue ; le pouvoir se concentre et celui qui exerce le pouvoir de direction est également celui qui assujettit juridiquement le salarié ».

Dans notre affaire, Générali, s'appuyant manifestement sur les thèses de B. BOUBLY, contestait la décision de la Cour d'appel de Paris du 31 mai 2007, au motif, notamment, « qu'un accord collectif emportant reconnaissance d'une unité économique et sociale entre plusieurs sociétés peut en
étendre les effets au-delà de la seule mise en place d'institutions représentatives du personnel et peut notamment reconnaître à l'UES la qualité d'employeur des salariés des entités membres de cette unité. Pour Générali, l'existence d'une UES supposant notamment une unité des pouvoirs de direction et une gestion centralisée du personnel, sa reconnaissance implique donc que l'UES exerce les prérogatives de l'employeur de sorte que le lien de subordination entre l'UES et les salariés des entités membres existe ».

La Cour de cassation rejette l'argumentation, et en profite pour rappeler le cadre de l'unité économique sociale ainsi que son nécessaire caractère protecteur des salariés.
Ainsi, selon la Haute cour, la reconnaissance conventionnelle ou judiciaire d'une unité économique et sociale entre des entités juridiques distinctes, ayant des activités complémentaires ou similaires et caractérisée par une concentration du pouvoir de direction économique et une
unité sociale, a pour objet d'assurer la protection des droits des salariés appartenant à une même collectivité de travail, en permettant à cette fin une représentation de leurs intérêtscommuns.

En conséquence, si la reconnaissance d'une UES permet l'expression collective de l'intérêt des travailleurs appartenant à cette collectivité, elle ne se substitue pas aux entités juridiques qui la composent, de sorte qu'elle n'a pas la personnalité morale.
La Cour conclut enfin que la reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail est un droit exclusivement attaché à la personne et que sauf disposition législative expresse, il ne peut être imposé à un salarié sans son accord un changement d'employeur. Il en résulte que si un accord
collectif reconnaissant une unité économique et sociale peut étendre ses effets au delà des institutions représentatives du personnel et créer des obligations pour les différentes entités juridiques composant l'UES, il ne peut faire d'une unité économique et sociale, l'employeur des salariés.
Cette décision de la Cour de cassation est un point d'appui considérable. La volonté de la Haute cour d'assurer les droits des salariés par une représentation adaptée en est l'expression.

Mais cette décision va également au delà. Le conseiller rapporteur, dans le rapport qu'il adresse à la chambre sociale de la Cour de cassation, en précise le contour.
« La notion d'entreprise, et sa reconnaissance sur la scène juridique a suscité de nombreux débats théoriques ». En fait, deux théories s'affrontent :
  1. La première est celle de la théorie institutionnelle de l'entreprise. Il y est soutenu que « l'entreprise serait un centre d'intérêt autonome, une entité dotée de fins propres, qui justifie une protection spécifique, ses dirigeants agissant dans l'intérêt de l'entreprise, distinct de celui de l'entrepreneur de sorte qu'il pourrait lui être reconnu une personnalité économique.
  2. La seconde est le fait de « ceux qui ont mis en avant une approche conflictuelle des relations du travail, née du contrat individuel de travail caractérisé par la subordination, et dans laquelle les intérêts des salariés et celui de l'employeur sont antagonistes.
En tant que militants FORCE OUVRIERE, nous ne sommes bien entendu pas indifférents à ce débat, qui est aussi celui du syndicalisme. C'est justement parce que cette deuxième théorie correspond à notre pratique syndicale que la Section Fédérale FO des assurances a refusé cet accord Générali du 13 octobre 2004.

(Cassation Sociale du 16 décembre 2008, n°07-43.875)


Unité économique et sociale

En droit français, l'unité économique et sociale (UES) est une notion contraignant au regroupement de plusieurs entreprises juridiquement distinctes pour la mise en place d'un comité d'entreprise (CE) commun. Elle résulte d'une décision de justice ou d'un accord conventionnel. L'unité constituée doit regrouper un minimum de cinquante salariés.

L'article L. 2322 - 4 (ancien L. 431 - 1) du code du travail prévoit que "lorsqu'une UES regroupant au moins cinquante salariés est reconnue par convention ou par décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes, la mise en place d'un CE commun est obligatoire".

Cette notion est d'origine jurisprudentielle. Apparue pour la première fois dans un arrêt de la Cour de cassation du 23 avril 1970, elle a été reprise par la loi Auroux du 28 octobre 1982. On retrouve la notion d'UES dans les lois Aubry (13 juin 1998 et 19 janvier 2000) relatives à la réduction du temps de travail ainsi que dans la loi du 19 février 2001 relative à l’épargne salariale.

L'unité économique et sociale est un ensemble économique et social dégagé de plusieurs entités juridiques distinctes ( sociétés, associations…) qui ont une complémentarité d’activité, une communauté de pouvoirs et de direction, et une communauté de travailleurs.

L’ensemble dégagé sert de base à la mise en place d’Institutions Représentatives du Personnel en s’affranchissant des statuts sociaux des entreprises.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Unit%C3%A9_%C3%A9conomique_et_sociale



Note: Fédération des Employés et Cadres