InFOrmation syndicale

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05 mars 2009

LES BÉKÉS ET LES BANQUIERS


«Aux Antilles comme ici, on veut 200 €uros» - «Aux Antilles, y’a les békés, en France y’a les banquiers. Tous ensemble on va les faire céder».

Samedi 21 février, 1 500 travailleurs manifestaient dans les rues de Nantes pour exprimer leur soutien et leur solidarité avec les travailleurs de la Guadeloupe et de la Martinique.

Depuis le 20 janvier, les travailleurs de la Guadeloupe sont en grève totale. Ils répondent au mot d’ordre du collectif LKP (Lyiannaj Kont Pwofitasyon). Ils exigent satisfaction à leurs revendications, en particulier celle de 200 €uros d’augmentation de salaire.

Pendant plusieurs semaines, le gouvernement a laissé pourrir le conflit. Il espérait probablement que nos camarades guadeloupéens, isolés, finiraient par se lasser. En réalité, le gouvernement s’est trompé sur tout, puisque c’est exactement l’inverse qui s’est produit.

Aujourd’hui le mouvement s’est étendu à la Martinique, et peut-être bientôt à la Guyane et à la Réunion. Mais surtout il est évident qu’il recueille la sympathie de toute la classe ouvrière française dans un contexte où tout le monde s’interroge: Que va-t-il se passer ?

Chacun sait bien que la situation est explosive.

Depuis près de 30 ans, les gouvernements et le FMI imposent la baisse du coût du travail.

Cette politique aboutit aujourd’hui à une impasse. Les subterfuges utilisés pour tenter de retarder l’explosion de la crise financière, les subprimes par exemple, ont eu pour effet d’en amplifier des conséquences.

Sur le plan économique, le gouvernement et le patronat tentent aussi de retarder les licenciements. Ils usent de tous les moyens à leur disposition : RTT, congés, comptes épargne-temps, et bien sûr chômage partiel. Pourtant nous savons que dans les prochains mois, les licenciements seront massifs.

Le gouvernement est bien sûr inquiet. Pour éviter l’explosion il marche à reculons. Le travail du dimanche est passé aux oubliettes, la réforme des lycées abandonnée, celle de l’université a aussi du plomb dans l’aile… Sur tous ces sujets il fait des concessions, mais il en est un sur lequel il ne bouge pas d’un pouce : les salaires.

La grève et les manifestations du 29 janvier ont surpris le gouvernement et le patronat par leur ampleur. Ça chauffe !

Le gouvernement a été obligé de recevoir les Confédérations. Le 18 février, il a annoncé un certain nombre de mesures qui ont comme caractéristique essentielle de « tourner autour du pot », c'est-à-dire de contourner la question des salaires.

En Guadeloupe la situation est identique. Le gouvernement accepte de faire des avancées sur certains sujets, mais pas question de lâcher sur les 200 euros. Pourtant cette revendication est juste, elle est même « raisonnable ».

Si le gouvernement accordait 200 €uros à 20 millions de salariés du public, du privé, aux retraités, aux chômeurs, sur un an cela coûterait 48 milliards d’€uros, soit environ 3 fois et demi les bénéfices de TOTAL en 2008, et un peu moins que les 54 milliards de dividendes versés par les 40 entreprises du CAC 40.

Incontestablement, 200 €uros par mois, 400 pour un couple de salariés, permettraient de « mettre du beurre dans les épinards » , et contribueraient grandement à relancer la machine économique.

Mais cette revendication se heurte à la politique impulsée par l’Union européenne et relayée par tous les gouvernements depuis 1982.

Déjà Bruxelles menace la France de sanctions quand le gouvernement décide d’aider l’industrie automobile. Faut dire que ces aides sont contraires au Traité de Maastricht et au principe de « concurrence libre et non faussée ».

La question des salaires, qui aujourd’hui prend la forme du mot d’ordre « 200 euros », concentre d’une certaine manière tout le combat contre l’Union européenne et sa politique réactionnaire.

C’est pourquoi le gouvernement ne veut pas céder sur cette question, c’est pourquoi aussi il est certain qu’une nouvelle « journée de grève et de manifestations » le 19 mars ne sera pas suffisante pour obtenir satisfaction à nos revendications.

Nous savons bien que Bernard Thibault et François Chérèque ont une sorte de « deal » avec le gouvernement. Ce n’est pas nouveau. En 2003 Chérèque approuvait la contre-réforme Fillon sur les retraites, tandis que Thibault organisait la « contestation raisonnable » (la formule est de M. Fillon lui-même).

Depuis, les deux compères ont signé la « Position commune » , traduite dès le 20 août 2008 par une loi. Aujourd’hui la situation a légèrement évolué. Pour organiser la « contestation raisonnable » , ils s’y mettent à deux, Bernard et François la main dans la main. Pour autant il n’est pas certain qu’ils parviennent à tout contrôler.

En Guadeloupe, les travailleurs poursuivent la grève. Samedi 21 février à Dublin, 120 000 personnes ont manifesté pour dire Non au plan de rigueur et d'austérité.

Les Confédérations ont prévu de se rencontrer dès le lendemain du 19 mars : le 20 mars à 8 heures. Si le gouvernement et le patronat restent sourds, comme en Guadeloupe, c’est la grève jusqu’à satisfaction des revendications qui sera à l’ordre du jour.


Un Béké désigne aux Antilles françaises un habitant descendant des premiers colons esclavagistes. - http://fr.wikipedia.org/wiki/Béké


Note: Patrick HEBERT, Secrétaire général de l'UD CGT-FO de Loire Atlantique