Ce texte va servir de base à la réécriture en deux ans du code du travail.
En seulement douze pages et 61 articles courts, le rapport édicte des «principes essentiels» qui, réunis en huit chapitres, composeront le préambule du «code du travail» du XXIe siècle.
«A droit constant», nous dit-on... Mais la seule constance de ce gouvernement, c’est la destruction.
Le rapport Badinter affaiblit la portée normative du code du travail et ouvre la voie à tous les excès. Le danger est d’autant plus grand que, lors de la remise de ce texte, Manuel Valls a réaffirmé les propos tenus par François Hollande le 18 janvier dernier : les accords d’entreprise, majoritaires comme minoritaires, pourraient s’imposer au code du travail, aux conventions collectives et au contrat de travail, tant sur la question du temps de travail que sur celle des salaires. C’est le renversement de la hiérarchie des normes.
Un texte qui s’inscrit dans la politique du gouvernement Hollande/Valls contre les garanties collectives
Par ailleurs, après avoir fusionné les régimes d’auto-entrepreneur et de micro-entreprise en application de la loi Pinel, le gouvernement envisage désormais de relever les seuils de chiffre d’affaires de 32 900 euros à 80 000 euros pour les activités libérales et celles de services. L’objectif est de détourner un plus grand nombre de travailleurs du salariat et des garanties qui lui sont liées. D’où le caractère central que revêt pour le gouvernement le compte personnel d’activité (CPA).
Les «libertés et droits de la personne au travail » contre la reconnaissance du lien de subordinationLe premier chapitre du rapport Badinter met en avant la notion de « personne », qui met hypocritement tout le monde sur le même plan. Cela équivaut à sortir de la reconnaissance du lien de subordination entre le salarié et l’employeur, qui régit le droit du travail depuis plus d’un siècle. Le code du travail existe justement depuis 1910 parce qu’il n’y a pas égalité entre ces deux parties. Cela différencie le contrat de travail de tout autre contrat civil. Par ailleurs, l’article 1er prévoit que des « limitations » à ces « libertés », peuvent être apportées « par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise ».
Durée légale du travail : la dérogation permanenteL’article 33 du rapport Badinter indique que «la durée normale du travail est fixée par la loi». On sait que la prochaine étape dans la réforme du Code du travail est le projet de loi qui sera présenté le 9 mars prochain en conseil des ministres par Myriam El Khomri, avec pour objectif de réécrire les règles en matière de temps de travail.
D’ores et déjà, Manuel Valls a annoncé que « la dérogation à cette durée légale n’est plus une transgression ». Lors du forum économique mondial de Davos, Emmanuel Macron a donné sans état d’âme le contenu de la politique du gouvernement : «Si vous pouvez négocier des accords majoritaires au niveau de l’entreprise pour n’avoir presque aucune surcompensation, cela veut dire que vous pouvez créer plus de flexibilité». Cela revient « de facto » à la fin des 35 heures...
« Compensation » des heures supplémentaires : une baisse générale des salairesDéroger de manière permanente à la durée légale de travail implique de donner la possibilité à l’employeur de reculer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires. Aujourd’hui, les 8 premières heures sup effectuées dans une même semaine (de la 36e à la 43e heure) sont majorées à hauteur de 25 % ou à 10 % en cas d’accord majoritaire dérogatoire. Les suivantes le sont à hauteur de 50 %. Le rapport Badinter abandonne toute idée de majoration au profit d’une «compensation» qui n’engage en rien le patronat. Autant dire qu’un taux à 0 % est plus qu’envisageable...
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Voir aussi : Défendons le Code du Travail - Numéro Spécial 4 pages de L'Ouest-Syndicaliste « Défense du code du travail »