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13 avril 2017

[Interview] Le SNETAA-FO est le premier syndicat dans les lycées professionnels

Enseignement professionnel - Interview parue dans L'Ouest-Syndicaliste n°677
Olivier Rosier, secrétaire académique du SNETAA-FO (professeurs des lycées professionnels publics), a accepté de répondre aux questions de l’Ouest syndicaliste, dans un contexte général de remise en cause de l’enseignement professionnel. Pour sa part, le SNETAA-FO se  renforce dans les Pays de la Loire et notamment en Loire-Atlantique.


Peux-tu nous présenter le SNETAA-FO, dont tu es le secrétaire académique ?
Le SNETAA est le premier syndicat dans les lycées professionnels (LP) de l'académie de Nantes.
Nous avons obtenu près d'un tiers des voix aux dernières élections professionnelles, soit une progression de 5 %. Nous avons gagné un siège et sommes donc majoritaires en sièges. En Loire-Atlantique, le nombre d'adhérents est également en progression. Le SNETAA-FO est donc un syndicat en très bonne santé, puisqu’il a battu l'année dernière son nombre record d'adhérents.

Quelle est la situation dans les lycées professionnels (LP) ?
La situation des LP est aujourd'hui très dégradée. Nous ne sommes quasiment pas concernés par les ouvertures de postes et les filières de formation ne sont absolument pas valorisées. On demande tout et n'importe quoi aux professeurs des LP. Nous devons préparer des élèves aux métiers et, dans le même temps, accueillir tout type de public : les décrocheurs des collèges, les décrocheurs des lycées, les jeunes en rupture de contrat d'apprentissage et d'autres qui présentent des pathologies très sérieuses... Tout cela en application d’un principe qui domine dans notre ministère : l'inclusion. Cela va d’autant plus mal dans les classes que le recteur a augmenté les effectifs par classe à 35 en bac pro tertiaire, 30 en bac pro industriel et 15 dans les CAP.

Quels étaient les effectifs dans les classes auparavant ?
Avant 2013, les effectifs étaient de 24 élèves maximum en bac pro et 12 en CAP. Le dernier lycée où les effectifs en bac pro tertiaire étaient inférieurs à 35, c'était au LP Schumann à Cholet (49). Cette année, c’est fini. Avec le SNETAA, les enseignants de cet établissement sont partis en mouvement de contestation aujourd’hui.

Quelle est la relation entre les lycées professionnels et l’apprentissage ?
Il y a une volonté politique de subordonner l'enseignement professionnel aux centres de formation des apprentis (CFA). L’apprentissage serait la soi-disant voie d'excellence pour trouver un emploi aux élèves décrocheurs. Cela fait dix ans que l’on nous demande de prendre des apprentis en plus de nos élèves, dans les mêmes classes. Et on a la démonstration que dans tous les établissements où a été fait un « mixage des publics », ça ne marche pas...

Peux-tu revenir sur ce « mixage » des publics ?
Le recteur de l'Académie de Nantes et le Président de la Région Pays de la Loire ont signé un contrat pour favoriser le « mixage » des publics et des parcours. Tout cela au nom de la « pédagogie innovante ». Or, il faut savoir que les élèves en formation initiale et ceux en apprentissage n’ont pas du tout les mêmes rythmes de formation. Comment le collègue peut-il faire de la pédagogie quand il a certains élèves de manière permanente et d'autre régulièrement absents ? Où est la pédagogie innovante dans ces conditions ? En réalité, c’est du baratin. La Région met 350 millions d'euros sur la table pour la relance de l'apprentissage. A cela s'ajoutent les 300 millions d'euros de budget de fonctionnement pour les CFA : cela représente beaucoup d'argent… pour quelque chose qui ne marche pas. La Région a juste besoin de placer ses apprentis quelque part…

Quelle est la position du SNETAA-FO vis-à-vis de ce « mixage »  ?
Partout où il est implanté, le SNETAA refuse de mettre en place ces pseudo-pédagogies innovantes. L'apprentissage sur le BTS ou la licence professionnelle peut permettre l'insertion professionnelle, donc nous n'y sommes pas opposés. Par contre, concernant les premiers niveaux de qualification, V et IV, c’est-à-dire les CAP et les bacs pros, l'apprentissage ne répond pas aux besoins des entreprises. Donc nous sommes contre. Pour le SNETAA, c’est clair : les CAP et les bacs pros doivent rester dans l'enseignement professionnel initial public. C'est une formation initiale et celle-ci relève de l’Éducation nationale.

Que penser de la scolarité obligatoire à 18 ans, dont le gouvernement actuel fait la promotion ?
Appliquée à la voie professionnelle, la scolarité obligatoire à 18 ans pose un premier problème : les CAP n'y ont pas leur place. Le CAP se fait en deux ans s'il n'y a pas de redoublement, le jeune sort à 17 ans. Donc dans cette logique-là, les CAP doivent disparaître. Et le bac pro n'a plus vocation à être un diplôme d'insertion professionnelle... d'où l'idée de mettre en place des secondes professionnelles indifférenciées.

De quoi s'agit-il ?
C'est une expérimentation que le recteur de Nantes tente de mettre en place dans l'académie, à la demande du ministère, sans aucune base réglementaire. Le jeune va devoir choisir un « champ professionnel », dans lequel il fera un peu de maintenance, un peu d'électricité, un peu de bricolage, un peu de ci et un peu de ça… des choses qui n'ont rien à voir les unes avec les autres. Au bout d'un an, il devra choisir son orientation. Et là, pendant deux ans il se formera à son métier. À l'issue de son bac pro, il n'aura eu que deux années de professionnalisation au lieu de trois. Et en deux ans, on n'en fait pas un professionnel. Quand il arrivera à 18 ans, il ne sera donc pas un professionnel et il devra faire un BTS. Cette formule, on la retrouve dans tous les textes ministériels avec ce qu'ils appellent la formation « bac-3 à bac +3 ». L'objectif n'est plus d'avoir des CAP et des bacs pro, mais des jeunes que tu prends au collège et que tu emmèneras jusqu'à la licence pro.

Le pendant du « bac-3, bac +3 », n’est-ce pas la surcharge des effectifs dans les classes, avec des publics très divers ?
Complètement et cela peut devenir ingérable pour les collègues. Je peux même te dire que le nombre de démissions de collègues est en train d'exploser. Nombre d'entre eux veulent retourner dans le secteur privé, car ils déchantent, tant au niveau des montants de leurs salaires que de leurs conditions de travail...

Où en est l'expérimentation de la seconde indifférenciée dans l'académie ?
Pour l'instant, seul un établissement le met en place. Nous avons essayé de négocier, mais le rectorat et le chef d'établissement sont restés complètement sourds dans un premier temps. L'administration disait aux enseignants : « soit vous acceptez, soit nous fermons votre section ». C'est du chantage aux postes. Nous avons donc organisé le rapport de forces, dans un échange avec les adhérents du SNETAA de l’établissement. La situation a été très tendue. Il a fallu un mois pour parvenir à un compromis que nous aurions pu trouver tout de suite, car c'est notre proposition de départ qui a été retenue. Mais l’affaire est à suivre.

Peux-tu revenir sur la territorialisation de l'enseignement professionnel ?
La Région a une tutelle sur l’enseignement professionnel : elle a la main sur la carte des formations. Elle peut faire ouvrir ou mourir un lycée professionnel. Elle siège dans les conseils d'administration (CA). Dans le même temps, j'ai prévenu Madame Maurançais, 2ème Vice-présidente de la région Pays de la Loire en charge notamment de la formation professionnelle : il ne suffit pas de faire voter les mesures dans les CA, encore faut-il avoir des enseignants pour les mettre en œuvre. Et dans les LP, un collègue sur trois est au SNETAA. Par ailleurs, les camarades de la CGT, qui sont en deuxième position dans les LP, sont sur la même ligne que nous concernant l'apprentissage.

Peux-tu dire un mot sur le projet d'évaluation et PPCR, dont FO revendique le retrait ?
PPCR, c'est le « plus petit commun rémunérateur ». Ou comment enfler les enseignants pour qu'ils travaillent plus en les payant moins. Concernant l'évaluation, partout où le SNETAA sera fort, moins le chef d'établissement sera à l’aise avec l'évaluation. Tout est une question de rapports de force, en particulier dans les établissements. Les collègues d'ID-FO ont par ailleurs raison de dire que cette réforme va engendrer des situations très conflictuelles. Le SNETAA jouera en tout cas pleinement son rôle.