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28 septembre 2022

Pour le maintien de la puissance installée sur le site de Cordemais et de tous les emplois

 FO EDF Cordemais - interview de Christophe Juino, délégué syndical FO EDF Cordemais et de Franck Barbachou, secrétaire du syndicat FO EDF Cordemais

Le 6 septembre dernier, l'Union départementale et le syndicat FO Cordemais ont assisté, dans les locaux de la DDETS, à une réunion de présentation d'un "contrat d'études prospectives" organisé dans le cadre du "Pacte de Cordemais et de l’Estuaire de la Loire", "notamment en anticipation de la fermeture de la centrale de Cordemais".

La présence de Force Ouvrière avait donc pour seul objectif de réaffirmer aux représentants de l'Etat, en toute indépendance, nos revendications concernant la centrale de Cordemais : le maintien du site et de toute la puissance électrique installée, ainsi que de tous les emplois directs et indirects. FO a par ailleurs rappelé que le rôle d'une organisation syndicale n'était pas de pratiquer le "diagnostic partagé" en vue de gérer les suppressions d'emplois annoncées.

Dans l'ambiance feutrée de ce type de réunion, il y eut une petite gêne. Pour cause, les représentants de l'Etat étaient bien en peine de connaître la position définitive du gouvernement concernant la centrale de Cordemais. Le problème a donc été contourné: il s'agit désormais d'associer les organisations syndicales à un "pacte" sur les perspectives de l'emploi sur le "territoire" de Cordemais... sans y intégrer le devenir de la centrale thermique. Et, cela va mieux en le disant, sans FO.

Cette réunion a cependant été l'occasion d'un échange pour L'Ouest syndicaliste avec les camarades Franck Barbachou, secrétaire du syndicat FO d'EDF Cordemais, et Christophe Juino, délégué syndical sur le site.


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Interview de Christophe Juino et de Franck Barbachou, parue dans L'Ouest Syndicaliste n°730


Le coût de l'énergie - et notamment de l'électricité - est au cœur des préoccupations de tous les salariés. Quelle est votre analyse sur cette situation ?

Franck Barbachou – Alors que le prix de gros de l’électricité en France a atteint un record historique le vendredi 26 août à plus de 1000€ alors qu’il n’était qu’à 85€ / MWh il y a un an, la spéculation va bon train sur le prix de l’énergie. Sachant qu’actuellement, les fournisseurs alternatifs (Total, Direct énergie…) achètent à EDF le MWh  à 46€, c’est la loi ARENH.

Christophe Juino – à force de supprimer des moyens de production, nous ne pourrons plus passer les pics de consommation, en électricité. Il faut savoir que, techniquement, pour tout MWH installé en énergie renouvelable (ENR), il faut 1 MWH installé en pilotable. En effet, lorsqu’il fait très froid, qu’il n’y a pas ou peu de vent, la production d’éolien est faible voire nulle. Ce qui est rare devient cher. La politique de supprimer les moyens de production dits polluants est aussi chez nos voisins, ce qui fait que l’on n’a plus de marge au niveau européen.

FB – Alors que le prix de l’essence n’arrête pas de s’envoler ainsi que de l’énergie en général et de l’alimentation, nous voyons que même la spéculation fait envoler les prix. Nous assistons aujourd’hui à un décrochage entre les gros et les petits : pendant que la masse des Français galère, les milliardaires ont accumulé pas moins de 236 milliards en 19 mois, c’est plus qu’en une décennie !

Quelle est la situation de la centrale de Cordemais aujourd'hui ?

CJ – Plusieurs facteurs font qu’aujourd’hui nous avons à tout prix besoin de la centrale de Cordemais. Il existe plusieurs raisons :
L’effet corrosion constaté dans les centrales nucléaires françaises, la moitié du parc nucléaire à l’arrêt, le prix du gaz qui s’envole à cause de la guerre en Ukraine, la fermeture de la centrale de Fessenheim et celle du Havre récemment, l’installation d’ENR…
Aujourd’hui, plus qu’hier, nous voyons bien que la centrale au charbon de Cordemais est indispensable sur le réseau.

FB – Ce qu’il faut rappeler sur la centrale de Cordemais, c’est que nous recyclons 99 % de nos déchets. En clair, nous captons nos poussières pour en faire des cendres qui rentrent dans la constitution du ciment ou de remblai routier. Nous traitons nos fumées pour capter le soufre et les oxydes d’azote pour en faire du gypse qui rentre dans la fabrication du plâtre. Les centrales ne dépolluent pas comme Cordemais qui est aux normes environnementales de 2035.

CJ – Un projet de reconversion de la centrale en biomasse est annoncé. Nous devrions brûler 20 % de pellets issus de bois B. Nous saurons à l’automne si l’usine à pellets se fera à Cordemais. C’est 79 M € qu’il faut encore trouver ! Si usine il y a, la construction est prévue en 2024 avec une mise en service au second semestre 2025, trop tard sans doute pour que des tonnes de pellets made in Cordemais soient brûlés pour l’hiver 2026 sur nos tranches. En attendant, 15 000 tonnes devraient venir depuis la Norvège alimenter nos brûleurs en attendant ceux de l’usine de Reims – qui seront livrés en camion ! – qui doit encore obtenir une qualité suffisante de black pellets. Tournera-t-on dès cet hiver à 20% de mix charbon/pellets, dans le cadre du projet « biomasse 2022 » ? En tout cas, c’est l’entreprise PAPREC, à qui EDF vient de fournir le brevet Ecocombust, qui devait fabriquer les pellets. Non seulement celle-ci est citée dans le scandale des Panama papers, mais son PDG est mis en cause pour des soupçons de corruption et de favoritisme (Ouest France 21 juillet). 

FB – Nous nous interrogeons également sur le devenir du site de Cordemais quand l’EPR de Flamanville et les 80 éoliennes offshores seront en pleine production. Ces éoliennes, dont le service est prévu pour la fin de l’année d’ailleurs, c’est l’équivalent d’une tranche charbon ! Mais ne désespérons pas, en 2023, les deux tranches charbon de Cordemais devaient être mises en AGL (Arrêt Garantie Long), c’est-à-dire une mise en hibernation pour un certain temps avant de prononcer leur mort assurée… Mais que nenni ! Une annulation de la décision vient de tomber autorisant par décret à « réhausser le plafond de gaz à effet de serre », en clair ne plus avoir d’heure de fonctionnement limité comme auparavant, du fait de la sécurité réseau qui est menacée, donc une bonne nouvelle pour tous nos emplois pour l’année prochaine. à voir pour la suite…

Comment les salariés vivent-ils la situation de leur centrale, dont la fermeture est sans cesse annoncée puis reportée ?

CJ – Les salariés sont dans l’expectative et sont dubitatifs sur l’ensemble des décisions. Le ressort de la motivation est cassé. Ces différents revirements font que les agents qui ont signé un parcours professionnel peuvent partir. Mais ils se disent que s’ils avaient attendu, ils auraient pu rester dans la région. D’autres qui ont entamé les démarches et qui finalement ont trouvé une porte de sortie se retrouvent bloqués car la perte de compétence est trop importante. 

FB – Avec le nombre de salariés qui sont partis et le turn over important que nous connaissons, la centrale elle-même a perdu beaucoup de compétences. On peut cependant garder en positif le fait que les nouveaux arrivants vont peut-être impulser un nouvel élan à la centrale, du fait qu’ils n’ont pas subi les différents chauds et froids donnés par les politiques.

Quel projet industriel porte FO pour garantir le maintien sur le site de toute la puissance installée ainsi que de tous les emplois, directs et indirects ?

CJ – FO Cordemais revendique une alternative. Après une perte de temps inacceptable, nous exigeons de la direction d’EDF d’autres projets d’avenir, tel que l’hydrogène (comme à la centrale émile Huchet de Saint Avold).

FB – Et pourquoi pas des turbines alimentées à l’hydrogène vert ? Les industriels espèrent qu’en 2030, ils auront mis au point des turbines permettant de produire 500MW à partir d’hydrogène. Les éoliennes de Saint-Nazaire alimenteraient en électricité des hydroliseurs installés sur notre site qui permettraient ainsi de stocker cet hydrogène et de l’utiliser lorsque l’on en aurait besoin. Le surplus pourrait être vendu à l’extérieur de notre site. FO CORDEMAIS soutient tous les projets à la centrale de Cordemais qui permettraient de garder ainsi nos emplois directs et indirects.


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