On notait également la présence des représentants des départements voisins (Morbihan, Ille-et-Vilaine, Maine-et-Loire, Vendée et Mayenne).
Les années passées, en moyenne, une cinquantaine de militants participaient aux AG annuelles de FO-Com 44.Or le 19 octobre dernier, la barre des 80 participants a été franchie.
C'est là la confirmation de la tendance observée depuis la rentrée de septembre : on assiste à un renforcement de la participation militante à toutes les assemblées, qu'elles soient initiées par les "unions locales" et donc interprofessionnelles, ou par les syndicats de branche (métallurgie, Pôle-Emploi pour citer les deux derniers exemples en date).
En cette période d'austérité sans précédent, où plus que jamais tout est lié, il faut dire au demeurant que les personnels de la Poste et des télécommunications comptent parmi les travailleurs les plus exposés aux contre-réformes tous azimuts prises en application des diktats de l'Union européenne.
D'où la montée aux créneaux sur tous les fronts de FO-Com.
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Tour d'horizon ci-dessous avec le secrétaire général de la fédération, qui a bien voulu répondre aux questions de L'Ouest-Syndicaliste.
Interview de Jacques Dumans, secrétaire général de FO-Com
- L'Ouest Syndicaliste : Au cours de ton intervention, tu nous a dit que depuis la révolution industrielle du 19ème siècle, la téléphonie mobile représentait mondialement le troisième investissement en masse après le chemin de fer et l'automobile.
Mais tu nous as dit aussi qu'en France, paradoxalement, ce secteur était d'ores et déjà économiquement et socialement sinistré.
Peux-tu nous expliquer pourquoi ?
Jacques Dumans: Il en va des télécommunications comme de l'énergie ou du ferroviaire : pour imposer au forceps son "marché libre et non faussé", la Commission de Bruxelles fait tout pour déstabiliser les "opérateurs historiques". D'où un certain nombre de décisions ciblées ayant en fait dans le viseur France-Télécom : ainsi l'institution de cotisations-chômage pour ses fonctionnaires, la réévaluation de la contribution pour les retraites, ou encore la baisse des tarifs de"roaming" (faculté pour l'usager d'appeler ou d'être appelé via le réseau d'un opérateur mobile autre que le sien. La baisse des tarifs de roaming bénéficie donc aux "petits" opérateurs dont le réseau ne couvre qu'incomplètement le territoire national, en leur permettant de recourir au réseau d'un autre opérateur. (Ainsi désormais Free avec le réseau France-Télécom.)
Qui plus est, la Commission de Bruxelles, à force de pressions, est parvenue à imposer au gouvernement français son diktat d'introduction d'un quatrième opérateur sur le marché français (que se partageaient jusqu'alors Orange/France-Télécom, SFR et Bouygues).
Techniquement et économiquement cela n'avait aucune justification, mais l'objectif était la dérégulation low-cost du marché... et du coût du travail.
Coup au but : à un prix bradé, l'ARCEP (l'autorité de régulation) a accordé la quatrième licence à Free. Lequel Free casse les prix pour tailler des croupières aux trois autres opérateurs, qui à leur tour se lancent dans le low-cost. Ce qui a des conséquences en chaîne :
- D'une part, plus que jamais, les "ressources humaines", comme disent les "managers", deviennent des "variables d'ajustement" de la compétitivité. D'autant que priorité continue d'être donnée à la rémunération des actionnaires : France Télécom a distribué 35 milliards de dividendes en 10 ans, avec un taux de rendement de 8 à 12%, qui a liquidé les possibilités d'investissement alors que la valeur boursière des actifs s'est effondrée.
- D'autre part, pour éviter de creuser l'écart tarifaire avec Free, France Télécom et Bouygues sacrifient leurs investissements, la recherche et le développement ; et c'est ainsi que la France prend un retard de plus en plus important dans le déploiement de la fibre optique.
- Résultat : à terme, ce sont rien moins que 60 000 emplois qui risquent de disparaître dans l'ensemble de la filière, sous-traitants compris.
Les ministres Arnaud Monte-bourg et Fleur Pellerin n'ignorent rien de la situation. Mais comme chez vous pour STX, ils nous répondent par un aveu d'impuissance.
- L'OS : Ce désastre de la "libéralisation" du marché des télécoms ne devrait-il pas inciter le gouvernement à stopper le processus de privatisation de la Poste et à restaurer un vrai service postal républicain ?
J. Dumans : Parce que c'était le point de non-retour vers la privatisation de la Poste, FO s'était opposée avec force à la transformation, en 2010, de l'établissement public en société anonyme. Les partis qui constituaient l'opposition d'alors nous clamaient leur soutien, peu avares en déclarations-choc contre les dérives "libérales". Mais ceux qui forment désormais la nouvelle majorité gouvernementale ne paraissent guère empressés de revenir sur la contre-réforme de 2010.
Pourtant, si la volonté politique existait, le retour au statut d'établissement public ne se heurterait à aucun obstacle juridique et économique majeur : à l'inverse de ce qu'est devenu aujourd'hui France Télécom, il n'y a pas (pour l'heure encore) d'actionnaires privés à la Poste susceptibles de s'estimer lésés et donc de se battre contre le retour au statut antérieur. Mais visiblement, sur ce dossier "sensible" comme sur tant d'autres, le "changement", c'est "pas maintenant".
- L'OS : Qui plus est l'ACERP (l'autorité de régulation précitée) vient d'agréer Médiapost, une filiale artificiellement constituée par la Poste,... pour la distribution concurrente du "courrier adressé". N'est-ce pas là un coup de poignard délibéré et potentiellement mortel pour le service public du courrier ?
J. Dumans : Pour amplifier son processus de privatisation, La Poste multiplie ses filiales, auxquelles elle dédie toutes les nouvelles activités à forte valeur ajoutée. Dans ce cadre, l'affaire Médiapost est explosive. En janvier dernier, la Poste a demandé à l'ACERP, qui a donné son aval le 24 juillet (avec publication de la décision au JO du 26 septembre), que sa filiale Médiapost puisse, concurremment à La Poste elle-même, devenir distributrice du courrier dit "adressé".
L'ouverture à la concurrence du marché postal, en application des directives de Bruxelles transposées dans notre législation, a fait un flop retentissant. Vous ne croisez pas dans la rue les préposés de la "Deutsche Post" en train de distribuer le courrier aux riverains. Du coup la direction de la Poste a décidé sa propre mise en concurrence, avec distribution "low cost" par sa filiale du courrier "adressé".
Le secret de ce "low cost" ? Tout simplement le fait que les dépenses salariales constituent la majeure partie du coût de la distribution postale, et que les salariés de Médiapost relèvent d'une convention collective au contenu très inférieur, non seulement au statut des fonctionnaires de la Poste, mais aussi de ses personnels en CDI ou en CDD. L'arme commerciale de Médiapost, c'est la précarité de ses recrutements : intérimaires, CDD à temps partiel, jobs occasionnels d'appoint pour les retraités aux fins de mois difficiles, etc.
Dès lors, la direction de la Poste aura tôt fait d'utiliser le "low cost" de sa propre filiale pour signifier aux fonctionnaires et contractuels de la "Maison mère" leur manque de compétitivité dû à un coût du travail trop élevé. Comme nous l'avons écrit dans un tract récent, si le processus n'est pas mis en échec, voilà qui voue ladite "Maison mère", avec ses 240 000 postiers, au statut de "réserve d'indiens" promis à la disparition progressive ... ou accélérée.
Là encore, et c'est vrai aussi pour les choix à opérer concernant la Banque Postale, c'est au gouvernement de prendre ses responsabilités. Car l'argument qu'il nous fait valoir pour l'automobile ou la sidérurgie, d'absence de marge de manoeuvre du pouvoir politique, ne peut pas être allégué concernant la Poste dont le capital est 100% public. Donc il faudra bien que le gouvernement affiche la couleur sans se cacher derrière son petit doigt!
- L'OS : La direction de la Poste avait fait appel à Jean Kaspar, un ex-secrétaire général de la CFDT, pour rédiger un "rapport", assorti de préconisations, sur les blocages du "dialogue social" dans l'établissement.
Ce "rapport", aujourd'hui public, est-il un point d'appui pour vos revendications?
Ou relève-t-il au contraire du genre d'arme de guerre enrobée de verbiage lénifiant que la CFDT a coutume de livrer sur un plateau d'argent aux gouvernements et au patronat ?
J. Dumans : Kaspar s'est livré à un exercice délicat, l'obligeant à pratiquer le grand écart.
Il n'a pas pu, justement parce que c'est sur le "malaise" à la Poste que son "expertise" était sollicitée, nier les évidences. Du coup il a dû confirmer ce que FO dénonce depuis bien longtemps : effectifs et cadences trop tendus, réorganisations incessantes générant insécurisation et stress des personnels, etc.
Mais l'auteur a pris grand soin d'évacuer la cause profonde du "malaise" : la course à la profitabilité et à la financiarisation, antichambre de la privatisation. Et par une belle pirouette jésuitique, ses préconisations conclusives aboutissent à la nécessité ... de poursuivre plus avant la politique de destruction du service public : il faudrait ainsi, après le passage en "société anonyme", se préparer à une nouvelle "étape" (comprendre la privatisation), revoir "l'employabilité" (comprendre la "flexibilité") à la Poste, etc.
... Le tout en invitant les syndicats à cogérer et co-construire.
- L'OS : Et FO ne mange pas de ce pain-là ?
J. Dumans : Moins que jamais.
Et c'est la raison pour laquelle nos équipes militantes se déploient sur le terrain pour alerter les collègues sur les enjeux cruciaux de la période actuelle.
A cet égard je ne puis que féliciter FO-Com 44, son secrétaire Jérôme Perrocheau et les camarades qui l'entourent, pour le travail accompli ces dernières années. Le succès de la présente assemblée départementale en est la conséquence, en même temps qu'un tremplin pour le renforcement à venir du syndicat.
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FO-com 44 vous invite à consulter son nouveau site internet : focom44.asso-web.com