Aucun pays n’échappe au recul de son PIB au dernier trimestre 2012 et surtout pas ceux qui suivent les recommandations de la Troïka.
Pour le gouvernement, les lendemains de Saint-Valentin déchantent. Vendredi 15 février, l’INSEE a rendu publics deux chiffres qui achèvent, dans tous les sens du terme, le bilan économique de l’année dernière. En premier lieu, l’activité économique du dernier trimestre 2012 s’est contractée de 0,3% et 2012 aura été une année nulle sur le plan de la croissance. Il faut remonter à la période 2008-2009, au plus fort de la crise, pour trouver des chiffres aussi mauvais. En second lieu, l’institut a comptabilisé près de 70.000 destructions d’emplois sur l’année dont plus de 28.000 rien que pour le dernier trimestre. En clair, la France est aux portes de la récession économique et le chômage augmente de façon endémique. Une situation qui ne risque pas de s’arranger de sitôt, toujours selon l’INSEE qui prévoit une quasi-stabilité du PIB pour le premier semestre 2013. Ce diagnostic vient contrecarrer la stratégie du gouvernement qui a fait de la réduction des déficits publics la pierre angulaire de son action. Il a en effet tout misé sur un déficit limité à 3% grâce aux hausses d’impôts votées en 2012 –dont la plupart ne prennent effet que cette année– ainsi qu’à une croissance de 0,8% qui semble aujourd’hui impossible à atteindre.
Après avoir affirmé durant la campagne électorale qu’il était possible de réduire les déficits tout en menant une politique d’investissement, le chef de l’État est maintenant confronté aux limites de cette méthode Coué. Puisque les mesures de rigueur instaurées depuis son élection ne suffiront pas, la tentation va être grande d’augmenter la dose, d’autant plus que l’objectif final, imposé par les traités européens, est de parvenir à 0% de déficit en 2017. Un détail, toutefois: un nombre croissant d’économistes estiment que les politiques d’austérité aggravent la crise plus qu’elles ne la résolvent et il suffit de regarder au-delà de nos frontières pour s’en apercevoir.
UN REMÈDE PIRE QUE LE MAL
Selon Eurostat, l’équivalent européen de l’INSEE, l’Europe aura connu, en 2012, une récession de 0,3% et même de 0,5% pour la zone euro dans laquelle les politiques d’austérité sont les plus fortes. Un mouvement qui n’épargne personne: de l’Italie de Mario Monti (-2,7%) au Portugal (-3,2%), qui a limité son déficit à 5% du PIB, comme le lui demandait la Troïka, comme en Grèce (-6,5% après -7,1% en 2011). Même l’Allemagne a vu son PIB chuter de 0,6% au dernier trimestre, ce qui porte sa croissance 2012 à seulement 0,7% et elle n’attend plus que 0,4% cette année. Pourquoi une telle contagion? Selon le très sérieux Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), elle s’explique précisément par le fait que tous les pays mènent en même temps une politique d’austérité, ce qui produit un effet multiplicateur qui en amplifie les effets. Exemple: l’économie allemande est tirée par les exportations, notamment automobiles. Mais lorsque tous les pays européens se serrent la ceinture et que le pouvoir d’achat recule, les constructeurs automobiles d’outre-Rhin voient leurs ventes reculer. C’est aussi à cause de ce fameux effet multiplicateur que le chef économiste du FMI a reconnu récemment s’être trompé dans les prévisions de croissance des pays dans lesquels sont menées les politiques qu’il préconise. En l’occurrence, la cure d’austérité a eu un impact négatif sur la consommation des ménages et l’investissement des entreprises. Un mea culpa qui n’est visiblement pas parvenu jusqu’au Premier ministre pour lequel «l’objectif, et il sera atteint, c’est le déficit zéro à la fin du quinquennat».
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Article paru dans FO Hebdo 3063