Sous couvert de remédier à une inégalité homme-femme, l’État va rogner les droits des femmes, et donc des familles, faisant au passage une économie de 405 millions d’euros.
Le gouvernement a annoncé qu’il allait réformer le congé parental afin de favoriser un meilleur partage entre les pères et les mères. Son projet de loi pour l’égalité entre les hommes et les femmes, qui devait être présenté le 3 juillet en Conseil des ministres, prévoit de rendre obligatoire un partage du temps: les parents d’un seul enfant, qui ont aujourd’hui droit à six mois de congé parental, pourront prendre six mois de plus à la condition que ce soit le second parent qui en soit bénéficiaire. À partir de deux enfants, le congé parental, dont la durée est de trois ans, sera raccourci à deux ans et demi pour un parent, les six mois restants ne pouvant être pris que par l’autre parent. La ministre des Droits de la femme, Najat Vallaud-Belkacem, a estimé que la réforme pourrait porter le nombre des hommes ayant recours au congé parental à 100.000 d’ici à 2017, alors qu’ils ne sont aujourd’hui que 18.000. La réforme va-t-elle réellement inciter les pères à prendre part de manière plus importante au congé parental? Le projet gouvernemental a recueilli un avis défavorable du conseil de la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) –avis auquel les représentants de FO ont contribué. Ces derniers ont souligné que le projet gouvernemental enlève des droits aux femmes, donc aux familles, sans certitude que les pères prendront bien part au congé parental. L’État ferait ainsi au passage une économie de 405 millions d’euros.
«Si les pères le plus souvent n’arrêtent pas leur activité, c’est sans doute en grande partie dû aux écarts de salaires entre les femmes et les hommes, puisque les salaires des femmes sont en moyenne inférieurs de 30% à ceux des hommes, indique Jean-Marc Bilquez, Secrétaire confédéral FO chargé de la protection sociale. Si l’on ne remédie pas au préalable aux inégalités de salaire, la mesure ne sera pas réellement efficace.»
LES PÈRES EN RESTE
Une étude de l’INSEE, publiée le 24 juin, vient corroborer cette analyse. Cette enquête montre que seulement un père sur neuf réduit ou interrompt son activité professionnelle pendant au moins un mois après la naissance d’un enfant (contre plus d’une mère sur deux). Quarante-six pour cent des pères ont déclaré que le congé parental ne les intéressait pas a priori, contre 25% des mères. Parmi les hommes qui ont pensé au congé parental mais qui ne l’ont pas pris, 30% invoquent le risque d’un effet néfaste sur leur travail ou leur carrière et un petit quart d’entre eux a déclaré que le congé parental n’était pas assez payé.
Du côté des mères, les employées et ouvrières sont plus enclines à interrompre leur activité professionnelle (47% des mères titulaires d’un diplôme de niveau CAP-BEP ou inférieur le font) que les cadres et professions intermédiaires (29% des mères diplômées, bac+2 et supérieur). Car, selon l’INSEE, leur perte de salaire est moins forte et relativement mieux compensée par la prestation du congé parental (ou CLCA, Complément de libre choix d’activité, d’un montant d’environ 390 euros mensuels à taux plein) et par les économies réalisées sur les frais de garde et de transport.
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Article paru dans FO Hebdo 3082