InFOrmation syndicale

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07 octobre 2015

Comme larrons en foire

par Michel Le Roc’h, secrétaire général de l’UD CGT-FO de Loire-Atlantique

Le premier ministre Manuels Valls a qualifié dimanche dernier, dans la Drôme, son action de « social-réformisme », assise à la fois sur l'amélioration de la compétitivité des entreprises et sur la réduction des inégalités.
La France est justement l'un des pays « développés » où les inégalités se sont le plus creusées ces dernières années. Elles ont augmenté de 2,9% selon une étude de l'OCDE publiée au mois de mai dernier. Il s'agit là de la 5ème hausse la plus importante parmi les 34 pays de l'OCDE, juste derrière l'Espagne, l'Irlande et la Grèce. Le niveau des prestations sociales existant en France a toutefois atténué cette hausse, mais pour combien de temps encore ? 10% des plus pauvres ont vu leurs revenus diminuer de 1% par an et à l'inverse, 10% des plus riches ont vu leurs revenus augmenter de 2% par an. Les dirigeants des grands groupes français ont reçu pour leur part 153 millions d'€ de rémunérations en 2014, soit une augmentation de 10% en un an, la palme revenant au PDG de Renault, Carlos Ghosn, qui a enregistré une hausse de 174% de ses rémunérations (7,161 millions d'€).

Une « paille » sans doute pour le « social-réformiste » Manuel Valls qui, dans son discours, a confirmé le cap fixé de réduction du coût du travail, « en d'autres termes, le pacte de responsabilité et de solidarité, tout le pacte, le pacte jusqu'au bout » et ses 41 milliards d'€ d'exonérations et de crédit d'impôt compétitivité emploi (Cice) sur trois ans. Il a fustigé « tous les conservatismes », en particulier dans le mouvement syndical. Il s'en est pris aux organisations syndicales qui, « par principe refusent d'avancer » et de signer le protocole d'accord dans la Fonction Publique sur « les parcours professionnels, sur les carrières et les rémunérations ».

A la CGT-FO, nous sommes au contraire attachés aux progrès et aux réformes, dès lors qu'elles améliorent le sort de la classe ouvrière. Ceux qui refusent d'avancer, ce sont ceux qui rêvent d'un retour au contrat de louage de service, qui agissent pour détruire la sécurité sociale, le code du travail et le statut général de la Fonction Publique. Nous ne pouvions accepter de signer un protocole octroyant généreusement quelques miettes aux fonctionnaires et entérinant le blocage du point d'indice dans la Fonction Publique. Nous ne nous laisserons pas entraîner sur le terrain de la participation à la mise en œuvre de contre-réformes réactionnaires, fussent-elles rebaptisées de « réformistes ».

Dans son intervention, Manuel Valls s'est félicité par contre « des propositions courageuses d'économies » faites par la CFDT concernant les retraites complémentaires et il a enjoint le Medef et la CGPME de prendre leurs responsabilités en acceptant de discuter les recommandations « Cédétistes ». Dans l'impasse depuis plusieurs mois, les négociations sur les retraites complémentaires entre le patronat et les organisations syndicales doivent reprendre le 16 octobre prochain. Se sentant pousser des ailes, le patronat avait dès le départ proposé des abattements pour inciter les salariés à partir à la  retraite après 65 ans. La CFDT - qui rappelons-le revendique plus globalement une réforme systémique des retraites - propose entre autres de mettre à contribution les futurs retraités à hauteur de 4% de leur pension pendant 2 ans, de réduire le taux de rendement du point de retraite, de poursuivre pendant trois ans la sous-indexation des pensions, de soumettre les pensions de réversion sous condition de ressources. Laurent Berger propose de ne pas augmenter le taux de cotisation patronale avant  2019 et de façon modérée, « conscient de la nécessité de ne pas alourdir le coût du travail » des employeurs. C'est avec ces mêmes arguments qu'il soutient depuis son arrivée à la tête de la CFDT toutes les mesures scélérates – pacte de responsabilité, loi Macron, etc. - que nous avons combattues en commun avec la CGT, la FSU et Solidaires, y compris par la grève et les manifestations.

Nous aurions donc le choix entre les propositions du Medef, de recul du départ à la retraite et celles de la CFDT fondées sur une baisse de la pension et permettant d'économiser 2,4 milliards par an d'ici 2018. Nous sommes bien entendu, pour notre part, attachés à l'existence des régimes paritaires Agirc et Arcco. Mais peut-on accepter le chantage qui consiste à tailler dans le vif ou à mettre la clé sous la porte ? Un point de cotisation supplémentaire, appliqué graduellement, permettrait de faire entrer à terme 6 milliards d'€ par an. Ce serait largement suffisant pour assurer le versement des pensions jusqu'en 2030.

Mais malheureusement, et nous le savons, l'objectif du gouvernement et de ses alliés (Medef et CFDT) n'est pas là. Dans ces conditions, nous n'avons pas d'autres choix que d’œuvrer pour renforcer l'axe de la résistance et préparer ainsi la contre-offensive afin de bloquer la marche à la barbarie. Ce qui fonde l'action commune, ce sont les revendications clairement exprimées, avec la volonté de gagner. Dans la continuité de la grève interprofessionnelle du 9 avril dernier mais aussi des grèves dans l'enseignement contre la réforme du collège ou dans le secteur hospitalier contre le projet de loi « Santé », préparons dès maintenant la riposte d'envergure qu'impose la situation.