par Michel Le Roc’h, secrétaire général de l’UD CGT-FO de Loire-Atlantique
Quelques jours après la désillusion des résultats des élections européennes, de nombreux « marcheurs » tentent de se rassurer à bon compte. Plusieurs sondages indiquent une embellie et un regain de confiance pour le président de la République et le Premier ministre. Pour eux, le mouvement des gilets jaunes, « c’est du passé » et l’exécutif peut aborder sereinement le nouvel acte du quinquennat, « sans changement de cap ».
C’est confiant, semble-t-il, qu’Edouard Philippe a présenté le 12 juin devant l’Assemblée Nationale l’acte II du quinquennat avec ses mesures phares : entre autres, le durcissement des conditions d’accès à l’indemnisation pour les chômeurs dans le cadre d’une étatisation accélérée de l’assurance chômage(1) et une incitation à travailler plus longtemps, avec l’instauration d’un « âge d’équilibre » ou « âge pivot » à 64 ans pour le départ à la retraite.
De telles annonces suscitent déjà émoi et colère. Le fossé ne cesse de se creuser entre ceux qui « en haut » détruisent les conquêtes sociales et la grande majorité qui « en bas » luttent pour défendre leurs intérêts et leurs conditions d’existence.
Samedi 15 juin avant le début de la finale du Top 14 de Rugby, Emmanuel Macron a reçu une longue et impressionnante salve de huées et de sifflets à son entrée sur la pelouse du Stade de France. L’illusion a soudainement laissé place à la réalité.
La réalité, c’est ce que vivent tous les jours les hospitaliers des urgences, épuisés par la détérioration des conditions de travail, le manque de postes et de lits. Malgré les réquisitions et les intimidations, la grève s’étend et ce sont maintenant 120 services d’urgences qui sont mobilisés.
Contrainte de répondre à cette colère, la ministre Agnès Buzyn a annoncé débloquer 70 malheureux petits millions d’euros, dont 15 millions d’euros pour les embauches là où il en faudrait dix fois plus pour commencer à inverser la tendance et 55 millions pour les primes, soit 100 € pour chaque agent, là où ils en réclament 300.
Ce n’est pas une surprise, la ministre a choisi de ne pas répondre aux revendications des agents et à leurs revendications, prenant la responsabilité d’un durcissement de la mobilisation et de la généralisation de la grève.
La méthode est toujours la même. L’exécutif considère que la place des organisations syndicales n’est pas de revendiquer mais de participer à la mise en œuvre de la destruction de toutes nos conquêtes sociales dans le cadre de concertations qui prennent des formes diverses.
Notre confédération a eu mille fois raison de quitter le cadre des concertations organisées autour du haut-commissaire Jean-Paul Delevoye pour avancer dans la mise en place d’un régime universel de retraite. La déclaration de la Commission Exécutive Confédérale du 16 mai dernier réaffirme clairement notre « opposition résolue au projet de réforme des retraites vers un régime universel » et « à toute forme de dispositif (…) conduisant à contraindre les salariés à travailler jusqu’à 63 – 64 ans ».
Face à l’exécutif, la clarté est une des conditions des succès à venir.
Clarté et fermeté… Fermeté également vis-à-vis du président de la République. Saluer le discours « fort » d’Emmanuel Macron « en faveur des normes internationales » à l’occasion de la conférence internationale du travail, ne peut que troubler les militants.
Pour contraindre le gouvernement et obtenir l’abandon du projet de « réforme » des retraites, nous devons plus que jamais être déterminés et préparer sérieusement les conditions de la grève. Il nous faudra bien entendu déjouer le petit jeu des rituelles « journées d’action » dont la fonction est d’épuiser, d’isoler et démoraliser les salariés les plus combatifs.
Ainsi, le rassemblement du samedi 21 septembre prochain, loin d’être « une journée d’action » de plus, doit être conçu comme un tremplin pour préparer la grève et obtenir le retrait de la « réforme » du gouvernement. Donner confiance aux militants et aux syndiqués… pour gagner !
(1) Il faudra avoir travaillé l’équivalent de six mois durant les 24 mois précédents au lieu de quatre mois durant 28 mois actuellement. S’y ajoute l’allongement de la durée requise pour recharger ses droits quand on est contraint aux CDD successifs : le passage à 6 mois d’activité au lieu de 1 mois requis (150 heures) conduira à sortir nombre de précaires de l’indemnisation. La confédération condamne fermement dans son communiqué du 18 juin toutes ces dispositions.