par Claire Compain - Dossier paru dans L'Ouest-Syndicaliste n°754
Comme le dit Michel Beaugas dans une interview à Ouest France le 28
février 2025, «Le « conclave » est un piège tendu par François Bayrou».
Piège dont Force Ouvrière s’est extraite en claquant la porte.
Pour résumer, il ne s’agit pas de discuter de l’abrogation de la réforme des retraites mais de réfléchir à la manière de financer la réforme Macron, quitte à remettre en cause la répartition (voir les 80 ans de la Sécu). Le piège du « conclave » est concentré dans cette formule « en l’absence d’accord, la réforme de 2023 s’appliquera ». Or, elle n’a pas été suspendue et continue de s’appliquer. En 2026, il faudra avoir 63 ans et 170 trimestres pour partir en retraite !
Pour encadrer les travaux du «conclave», le gouvernement a commandé un rapport sur la situation des retraites et leurs perspectives d’évolution, non pas au Conseil d’Orientation des Retraites (le COR) qui a été spécialement créé en 2000 pour exercer cette mission, mais à la Cour des comptes. La manœuvre est grossière.
Les chiffres annoncés par le COR avaient coûté sa place à son Président en octobre 2023. Il était écrit dans le rapport que les dépenses de retraite représentaient un peu moins de 14 % du PIB et que le système des retraites était excédentaire de 8,5 milliards d’€uros. Très compliqué de justifier une réforme des retraites dans ces conditions. Et il en est de même aujourd’hui puisque la Cour des comptes est obligée de reprendre les mêmes chiffres. La différence tient dans la présentation d’un « déficit » qui impliquerait d’aller encore plus loin.
Les comptes 2024 ne sont pas encore publiés mais des experts prédisent un déficit de 6,6 milliards d’€uros en 2025, 14 à 15 milliards en 2035 et de 25 à 32 milliards en 2045. Ces chiffres n’ont rien d’inquiétant en comparaison du montant total de l’ensemble des retraites – environ 390 milliards d’euros en 2023.
Rappelons que les 55 milliards de déficit annoncés par Bayrou lors de son discours de politique générale est une supercherie qui visait à intégrer les retraites (pensions) des fonctionnaires aux dépenses. Or, le rapport précise qu’ils sont une obligation pour le gouvernement.
Autre preuve que la situation n’a rien de dramatique. En 2023, les dépenses liées aux retraites ont représenté 13,8% du PIB. Le rapport indique en page 40 que les dépenses diminueraient de 13,9 % en 2025 à un peu plus de 13 % en 2045.
D’après la Cour des comptes, deux régimes seraient particulièrement en difficulté : le régime général et la Caisse Nationale de Retraite des Agents des Collectivités Locales (CNRACL) qui concerne les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Mais dans l’étude du régime général, sont englobés les Indépendants (artisans et commerçants dont le régime est déficitaire), les salariés agricoles ainsi que les 4,9 milliards d’€uros de compensation financière instaurée depuis 1974, et dont les principaux bénéficiaires sont les exploitants agricoles, les salariés agricoles et les mineurs. À cela, est ajoutée la compensation des régimes spéciaux qui sont à présent équilibrés par le régime général et non par l’État. Là encore, il s‘agit d’un tour de passe-passe.
En revanche, le rapport insiste très lourdement sur l’AGIRC-ARRCO* dont les réserves s’élèvent à 78,5 milliards d’€uros avec un excédent de 9,9 milliards d’€uros pour la seule année 2023. La crainte que le gouvernement tente de s’approprier ces sommes intéressantes qui ne lui appartiennent pas est réel.
Le rapport de la Cour des comptes avance également qu’une augmentation de cotisations de 1 % provoquerait 57 000 licenciements. Pourtant, selon l’INSEE, 50 100 postes ont déjà été supprimés au 4ème trimestre 2024 alors qu’il n’y a pas eu d’augmentation. La cause des licenciements n’a donc rien à voir avec les cotisations.
Cette propagande ne poursuit qu’un objectif, celui d’essayer de prouver qu’on ne peut pas abroger la réforme de 2023 puis revenir à 60 ans.
Le MEDEF, le gouvernement mais aussi certains « syndicats » veulent en finir avec le système des retraites par répartition et nous imposer un système par capitalisation ou par points que nous avons combattu en 2019. Les montants en jeu sont immenses et une source de profits inestimable. Macron n’a qu’une idée en tête. Piller nos retraites pour financer les dépenses militaires en les élevant de 3,5 à 5 % du PIB.
*AGIRC-ARRCO : Association Générale des Institutions de Retraite Complémentaire des Cadres - Association des Régimes de Retraite Complémentaire
____ __ _
Voir aussi :
- Réunion retraites : FO quitte les négociations
- Les Dossiers de L'OS : Retraites 2025
- Haro sur les indemnités journalières des salariés du public comme du privé !
- Arrêt des exonérations de cotisations sociales