Les Français doutent des médicaments. Parallèlement à la montée en puissance de la science et de l’éducation ces deux précédents siècles, le médecin a progressivement supplanté le prêtre, associé à la guérison depuis des temps immémoriaux. Mais le docteur-chaman d’aujourd’hui a vu son image sérieusement écornée, non pas par une faillite de la science mais par celle de l’industrie pharmaceutique.
Les techniques d’influence de cette dernière sont devenues telles que la Haute autorité de la santé (HAS) a cru bon, récemment, de traduire un document de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) visant à en protéger les étudiants en médecine et donc futurs prescripteurs. Confrontés pour beaucoup à de longues et onéreuses années d’études, où la pharmacologie est une parente pauvre, ils sont des cibles faciles d’une industrie généreuse.
Dans le même temps, les Français sont de plus en plus nombreux à renoncer à consulter et s’auto-médicamentent tant bien que mal. Pris entre les scandales du type Mediator et les contrefaçons régulièrement débusquées sur Internet, ils ne savent plus à quel saint se vouer. Même les génériques, qui ont permis, d’après l’assurance-maladie, d’économiser 1,5 milliard d’euros à la Sécurité sociale en 2012, ne sont plus en odeur de sainteté. Fin 2012, un sondage faisait apparaître que les Français étaient moins nombreux qu’en 2011 à leur faire confiance. Une cote qui ne va pas s’améliorer après le problème de conditionnement intervenu chez le numéro un mondial du générique. Pas plus que celle des médicaments en général, quand on entend un pharmacologue réputé, comme le professeur Bernard Bégaud, souligner que 18 000 décès par an sont directement liés à la prise de médicaments, soit plus que les suicides et les accidents de la route réunis. Pour lui, «il faut donner les moyens à la pharmacovigilance». Des moyens? En cas de crise, à la rigueur...
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Article paru dans FO Hebdo 3080
AFOC à Nantes : http://www.fo44.org/p/afoc.html